En fait on aurait pu s'attendre à une certaine critique de la deuxième vague féminisme et plus précisément des intellectuelles des années 80 - l'auteure parle beaucoup de sa jeunesse dans les années 90 - en ciblant essentiellement un certain puritanisme qui a pu affecter les féministes anti-sexe, misandres, ou anti-porno voire partisanes du lesbianisme politique. Cette critique peut très largement être faite, à partir du moment où on reconnaît un discours qui somme toute se réduit à dire : "les hommes ne sont pas sensibles, ce sont les femmes qui le sont, dans les relations amoureuses et sexuelles" ce qui au fond n'est jamais qu'un moyen de colporter des stéréotypes de genre et d'essentialiser les pratiques entre sexes. Mais au final, il n'en est rien, le livre ne dit même pas, et consiste juste en un ramassis de clichés sur la crise de la virilité, la théorie du genre, les femmes se font belles pour être désirées par les hommes, les femmes sont fondamentalement jalouses entre elles, un homme féministe est trop coincé, les femmes souffrent existentiellement plus que les hommes, etc. et ne fait que reprendre la critique du fétichisme et de la sexuation des corps et de la société de consommation, du spectacle de la pornographie généralisée ou que sais-je encore, autour de concepts surannés tels que société de règles vs. société de normes, morale collective vs. éthique individuelle, etc. Ca ne va jamais aux sources (si ce n'est Eva Illoue citée plusieurs fois, c'est vous dire la rigueur intellectuelle du bousin), et ça raconte surtout ses déboires personnels en voulant faire de sa petite affaire privée une sorte d'étalon sociologique. Une démarche qui n'est pas en soi problématique mais le devient dès lors où c'est fait pour colporter à peu près tous les clichés réac sur le sujet tout en se prétendant féministe "autrement" et par "autrement" il faut juste comprendre "I'm a feminist but I like being choked in bed". Car il faut remettre un peu les choses en perspective et rappeler que si l'accès des femmes à la jouissance sexuelle peut être posé comme un problème de société, ça n'a été possible qu'à partir du moment où la sexualité et le corps des femmes n'est plus assigné qu'à la reproduction. Alors on ne sait pas bien ce qu'elle regrette finalement : le fait de ne pas jouir, ou le fait qu'elle puisse s'en plaindre ? Car au final le livre n'invente rien de ce qui relèverait d'un ars erotica, à moins que ça ne soit "se faire labourer le minou", toujours pas convaincu qu'une femme assumant de passer pour une salope soit un modèle d'émancipation et que si baiser fort fait frémir la bienpensance on ait signé là le début de la fin du patriarcat.

Rubedo
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le 9 mai 2024

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