La passe miroir, de Christelle Dabos, livre 1 : Les fiancés de l’hiver
Ophélie vit dans un monde qui a explosé bien longtemps auparavant : la Terre n’est plus une planète, mais un ensemble d’arches qui gravitent autour d’un noyau et l’on ne peut passer de l’une à l’autre qu’en empruntant un dirigeable. La jeune fille vit sur l’arche des animistes. Elle a le pouvoir de lire les objets et tient un musée. Cette vie tranquille correspond tout à fait à son caractère discret et peu confiant, mais elle va bientôt voler en éclat : Ophélie doit être mariée à un membre influent de l’arche du Pôle, bien loin de sa famille. Elle suit Thorn, son futur époux, à la Citacielle, mais parviendra-t-elle à s’adapter à ce monde glacé et brutal, alors que sa vie est menacée ?
Je ne tournerais pas autour du pot, j’ai a-do-ré cette lecture ! Le point fort du roman est son univers, extrêmement riche. L’auteure prend le temps de le déployer, petit à petit, avec délicatesse, comme de la dentelle. Il y a beaucoup de trouvailles intéressantes et une forme de magie nouvelle. Mais on y retrouve aussi des références connues, notamment un petit côté « Alice au Pays des Merveilles ». C’est bien simple, je n’ai pas croisé de si bel univers chez un auteur jeunesse français depuis Pierre Bottero, et j’ai souvent pensé à Philip Pullman et son « A la croisée des mondes » au cours de ma lecture.
Vous ne trouverez pas dans ce roman une action trépidante, mais l’histoire est tout de même très riche en événements et en rebondissements inattendus. Simplement, l’auteure pose les bases petit à petit, et tout comme Ophélie qui arrive dans un nouvel environnement, nous sommes d’abord des observateurs attentifs. Néanmoins les pièces du puzzle s’assemblent peu à peu, et Ophélie nous réserve quelques belles frayeurs ! C’est une intrigue de Cour, pour l’essentiel, un monde impitoyable où les apparences sont souvent illusoires. La fin, qui est ouverte, donne très envie de se jeter sur le second tome, qui n’est malheureusement pas encore sorti (peut-être en février 2015).
Les personnages sont également un point fort du roman, ils sont bien construits et ont tous un intérêt. Ophélie est très attachante, je me suis beaucoup reconnue dans cette jeune fille discrète qui déteste attirer l’attention. Elle connaît une belle évolution, j’ai aimé la voir s’affirmer. En revanche, elle a du mal avec les sentiments, en tout cas en ce qui concerne les hommes. Novice en la matière, elle a du mal à démêler ce qu’elle ressent.
J’ai beaucoup aimé Thorn et ses airs bourrus, assez torturé mais néanmoins protecteur. J’ai plutôt tendance à lui faire confiance, nous verrons par la suite si j’ai eu raison. Sa tante Berenilde est difficile à cerner, tantôt bienveillante tantôt dure, on se demande quel est son véritable but. Roseline, la tante d’Ophélie, est un personnage étonnant sous ses dehors rigides, prête à tout pour défendre sa nièce. Quant à la mère d’Ophélie, c’est une catastrophe ambulante, toujours à dire ce qu’il ne faut pas ! Il y en a encore beaucoup d’autres à citer, mais je vous laisse le plaisir de les découvrir !
Quant à la plume, elle est très agréable, bien affirmée pour un premier roman, je n’ai pas noté de grosse maladresse. Les descriptions sont très réussies, minutieuses, donnant vie à cet univers, et les dialogues sont convaincants. L’ensemble est vivant et l’on prend plaisir à suivre Ophélie. Il ne manque qu’un peu plus d’émotions pour que le mélange soit parfait, mais je chipote !
Ainsi, j’ai eu un coup de cœur pour ce roman et son bel univers qui se déploie petit à petit. J’ai adoré passer du temps en compagnie de cette vaste galerie de personnages, tous bien construits. L’intrigue est habilement menée et j’ai déjà hâte de savoir ce que Christelle Dabos nous réserve pour la suite. A conseiller à tous ceux qui aiment les univers fantasy, à partir de 12/13 ans (pour les bons lecteurs qui ne sont pas effrayés par les livres épais).