Publié sur L'Homme qui lit :
On ne compte plus les polars et autres thrillers dont l’action se déroule dans l’Allemagne nazie, passé déshonorant pour l’humanité mais source inépuisable d’inspiration pour les écrivains du monde entier. Il faut dire qu’en marge de ses activités les plus connues, le régime à la croix gammée flirtait sans trop s’en cacher avec un ésotérisme grotesque pour justifier une partie de son idéologie raciale. C’est dans cette ambiance mystique que nous entraîne le journaliste allemand Harald Gilbers, qui publie avec Les Fils d’Odin son second roman après Germania, paru l’an passé et mettant déjà en scène le même personnage principal.
Richard Oppenheimer est un ancien commissaire de Berlin, qui travallait dans la Kripo, la police criminelle, jusqu’à ce que ses origines juives deviennent problématiques à l’arrivée au pouvoir des nazis. Mis à pied, l’ancien flic a traversé la guerre dans la clandestinité en se faisant passé pour mort, et vivant sous un faux nom. C’est au coeur d’un Berlin en ruine, ravagé par les bombardements ennmis en ce tout début d’année 1945, qu’il va devoir reprendre du service pour sauver une amie qui lui est proche.
Hilde von Strachwitz est une femme médecin issue de l’aristocratie tant répugnée par le régime nazi, et farouche opposante à ce dernier. Lorsque Hauser, son mari médecin militaire revient à Berlin sans prévenir afin de lui demander son aide, elle se sent bien obligée de lui prêter main forte pour fuir le régime. Jusqu’à ce qu’elle découvre qu’il travaillait pour la SS au camp de concentration d’Auschwitz où il menait des expériences médicales sur les détenus.
Après leur dispute, le cadavre de l’officier est retrouvé dans un appartement de Berlin, décapité et les mains tranchées, et Hilde est arrêtée puis emprisonnée par la Gestapo, qui mène une enquête aussi expéditive qu’accablante avant son jugement par un instance habituée à distribuer des peines de mort à la plupart des procès.
C’est dans cette ambiance pressante, le procès et la condamnation d’un côté, l’avancée quotidienne des armées russes vers Berlin de l’autre, qu’Oppenheimer doit mener l’enquête le plus discrètement possible dans une ville en proie à la débâcle générale, aux derniers soubresauts d’un régime à l’agonie, où la population survit comme elle peut aux bombardements et à la pénurie d’eau, de nourriture et d’électricité.
Bien que se présentant comme ésotérique, l’aspect mystique n’est présent qu’au compte goutte dans ce roman qui se rapproche finalement plus du polar historique, et qui m’a rappelé pour beaucoup les romans de la saga Bernie Gunther de Philip Kerr (comme La dame de Zagreb), à propos de cet ancien commissaire de la Kripo… Le roman se lit bien, l’enquête est intéressante et les personnages crédibles, de même que le contexte de la débâcle est original, car il donne au récit une allure de course contre la montre. J’ai malgré tout lu ce roman sans passion dévorante, avec un arrière goût de déjà-lu.