Les Frères Sisters sont deux tueurs à gage missionné par le redouté "Commodore" pour éliminer Herman Kermit Warm, un homme dont nous ne savons pas grand chose au début du roman. Les deux frangins n’ont pas l’air d’en savoir beaucoup plus mais n’ont pas l’air non plus de s’en émouvoir. La morale n’étouffe pas Charlie, l"aîné, bourru et violent. Une cible est une cible et doit être éliminée. Le cadet – et narrateur, Elie, suit, sans doute fasciné par la maitrise et l’efficacité de son frangin, mais est enclin aux questionnements métaphysiques et aspire timidement à une autre vie. Les deux compères devront rejoindre la Californie pour mener à bien leur mission. L’occasion de braver quelques dangers attendus dans un Western, (faune sauvage et cow boy à la gâchette facile) mais aussi de deviser sur le sens de la vie, de tomber amoureux, de boire comme un trou, de rencontrer des personnages inattendus, un homme qui passe son temps à pleurer et à se lamenter, un adolescent simplet qu’on a envie de cogner, etc.

L’originalité de ce Western tient dans sa dimension burlesque qui lui donne toute sa saveur. Les chapitres, relativement courts, sont parfois consacrés aux bienfaits d’une invention récente comme la brosse à dents ou alors au régime du narrateur, épris d’une femme qu’il cherche à séduire… Ces deux exemples témoignent de l’art consommé du décalage auquel se livre Patrick DeWitt : il insère dans son récit des éléments de modernité (les joies d’une haleine fraiche, les maigres calories d’un plat de carottes cuites à l’eau) qui, en rompant les codes du genre, amusent le lecteur. On ne rira pas aux larmes mais on suivra, bonhomme et attendri, les aventures de cet improbable duo.

La dernière partie du roman, consacrée à la mission elle-même marque une évolution de la tonalité. Le récit joue moins sur les décalages à mesure que l’intrigue parvient à son terme. Il sera question d’orpaillage et des dégâts provoqués par le mercure… tant sur l’éco-système que sur nos deux héros… Comme tous les genres, le western se heurte parfois à des murs d’a priori. Un western… vraiment ?! A ces lecteurs, il faut dire qu’ils se trompent deux fois : outre qu’un western, même codifié, ça peut être bien, celui-ci est quand même un drôle de western…
Jules_Athouni
7
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le 15 mai 2014

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Jules Athouni

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