Difficile d'écrire une critique à ce livre tant attendu, tant il m'est difficile de dire si je l'ai aimé ou pas.
Fan de la Horde dès les premières pages, mais vraiment pas convaincu par la Zone du Dehors, que j'avais trouvé trop politique, j'ai trouvé Les Furtifs encore plus indigeste.
Si Damasio arrive à créer à nouveau un groupe de personnage attachants chacun à leur manière, avec chacun une voix, un langage, un vocabulaire distincts et reconnaissables instantanément tout en faisant évoluer leur voix tout au long du récit, il ne parvient pas à créer un rythme satisfaisant et un récit intéressant tout du long : ce livre est beaucoup trop long, farci d'un discours politique discutable (même si je partage certaines de ses idées), mais surtout exposé sans la moindre subtilité, et de façon répétée, jusqu'à en écœurer le lecteur. Le ton du récit dans ces passages est parfois à la limite du puéril tant il est manichéen et méprisant pour les "masses". Étonnant venant d'un auteur aussi intelligent.
C'est dommage, puisque le récit, s'il avait été amputé de ces passages, aurait été celui, émouvant, de la disparition d'une petite fille, un récit de manque, d'espoir et d'amour, le récit aussi de l'union d'un couple, d'un groupe, d'un pays pour la liberté. Le livre n'est jamais aussi brillant que lorsqu'il décrit les alternatives possibles à l'ordre établi (je pense à cet urbanisme alternatif génial par exemple, et aux furtifs bien évidemment) mais surtout lorsqu'il se concentre sur la relation de Lorca et Sahar et de l'amour qu'ils portent à leur fille. Le personnage de Saskia est également très bien écrit et particulièrement attachant.
Le livre est cependant très bien écrit, l'écriture est toujours aussi précise, le vocabulaire hyper travaillé, intelligent, changeant, divers, mutant, à l'image des Furtifs.. Une réussite de ce côté-là, le fond et la forme étant en totale cohérence, même si la lecture en est d'autant plus compliquée. Damasio va également parfois un peu trop loin dans ses expérimentations, jusqu'à en perdre le lecteur, qui décroche face à des passages donnant l'impression d'être écrits juste pour montrer qu'il en était capable, pour satisfaire son ego.
Une amère déception, à laquelle je m'attendais un peu, tant tout ce que fait Damasio semble animé d'un but politique. C'est tout à son honneur, mais dommage que ça ait gâché une belle histoire.