Je suis extrêmement friand de littérature russe et ayant déjà terminé avec avidité les classiques Tolstoï, Dostoïevski et consorts j'écumais les bibliothèques et librairies a la recherche de ce sentiment que seul les personnes vivant a l'est de l'Oural savent soulever en moi. Le hasard voulu qu'une amie Biélorusse m'indiqua ce classique de la literature qui est resté dans un certain anonymat sous nos latitudes françaises.
Grand bien lui a pris! Car ce livre est un chef d'oeuvre de la littérature russe!
Le roman met en scene sous forme de fresque familiale la vie de petits propriétaire terriens et se rapproche en ce sens des âmes mortes de N. Gogol qui décrivait également cette classe sociale sous un jour peu reluisant.
Là ou le roman se démarque c'est dans son approche presque naturaliste de cette famille Golovleff dominée par une mère tyrannique et dont les 3 enfants sombrent peu a peu dans la solitude, la stupidité et surtout l'hébétude. Sans trop révéler l'intrigue; les différents évènements du récit vont entrainer les personnages de cette famille dans un néant de pensée dans lequel seules la vodka et la superstition religieuse accompagneront les protagonistes jusqu'à la tombe.
La division en chapitre qui arrête le récit à des évènements ponctuels suivi d'un retour en arrière afin de lier avec le chapitre précèdent évoque Zola dont les chapitres sont toujours des évènements majeurs de la vie de ses héros. Cependant l'écriture de Saltykov est moins descriptive, plus portée par les dialogues et les réflexions sur ses personnages. les digressions permettent toujours des réflexions de l'auteur sur son pays. De chaque personnage il fait un type: Arina Petrovna la cheffe de famille, Stepka le flambeur, Porfiry le Tartuffe, Anninka l'actrice, Pavel l'imbécile couard...
Je recommande chaudement la relecture de ce classique oublié qui permet de saisir cette mentalité de petit propriétaires terriens russe a la fin du XIXème siècle (ce qui coincide avec la fin du servage) avec toutes les mesquineries, les bondieuseries et coups bas que cela implique.