Un livre très documenté, impressionnant par la quantité de travail fournie (c’est presque une thèse !). Il est indéniablement pédagogique, malgré quelques passages un peu denses et des notions chimiques pas toujours évidentes pour le grand public (je ne suis pas sûr que les électrons Pi parleront à tout le monde, par exemple !). On apprend plein de choses, et l’on ressent plus que jamais le désir de mieux utiliser nos merveilleux et trop négligés sens du goût et de l’odorat.
Toutefois, cet ouvrage me fait beaucoup questionner sur ce dont il est question. L’auteur prétend nous faire découvrir les tannins sous toutes ses formes ; or, de très (trop) nombreuses molécules abordées dans le livre ne sont en fait pas des tannins. Je pense à la lignine, aux anthocyanes, à la vanilline, à l’eugénol, parmi tant d’autres. Certes, dans l’introduction, et surtout dans la conclusion, l’auteur nous avertit (quoique trop rapidement à mon sens) que la définition des tannins (qui dans l’ouvrage tend trop souvent à se résumer à un synonyme de « polyphénol », voire de « phénol ») n’est pas toujours celle proposée par la communauté scientifique. Quoique tout soit sujet à discussion, je ne comprends toujours pas un tel raccourci, quand il suffirait de dire simplement que la lignine n’est pas un tannin, par exemple, ce que tout lecteur peut aisément admettre (et mieux comprendre que les électrons Pi d’ailleurs). La vulgarisation et la pédagogie n’impliquent pas de dire des choses erronées quand l’on peut aisément partir de postulats bien plus justes. Résumer le tannin au concept de « phénol », ce que l’on peut finir par croire au terme de la lecture, ce serait également inclure le paracétamol et la morphine dans la très vaste famille présentée par l’auteur, étant donné qu’il s’agit aussi de phénols…
En somme, c’est un ouvrage plutôt agréable à lire, où l’on apprend plein de choses - mais pas nécessairement sur les tannins tels qu’ils sont très généralement définis. Je préfère avertir le lecteur de cet aspect qui m’a personnellement dérangé. Attention donc à ne pas finir par croire que tout est essentiellement tannin chez les plantes ; c’est excessif mais c’est un peu l’impression générale que j’ai eue en reposant le livre. Avec, heureusement, la certitude que les tannins sont effectivement des molécules passionnantes.