Qu'on ne s'en méprenne, la lecture des Hauts de Hurle-Vent est une véritable joute avec un récit qui ne se livre aux lecteurs qu'à travers une attention scrupuleuse et une volonté en acier inox. Du passage d'un narrateur à l'autre, des narrations à la 3e voir même à la 4e personne ou encore des transformations du récit d'un personnage à l'autre, Emily Brontë a clairement eu comme ambition de livrer un récit novateur, hors du sentier battu du classicisme des romans de son ère.
Inutile d'entamer la lecture de ce désormais classique de littérature anglaise si vous y chercher une lecture d'été légère; ce singulier ouvrage (l'unique d'E.Brontë, décédée entre la 1e et la 2e édition) est comme un mille-feuille, non pas tant dans sa densité (tout de même 300 à 400 pages selon l'édition) mais plutôt dans la complexité du récit. L'histoire semble étrange, déstabilisante et pourtant on se doit de lui reconnaître une amplitude raboteuse chapitre après chapitre. Loin du roman classique, Brontë développe le scénario par strates qui se superposent en ajoutant à chaque couche son lot de nuances.
Les Hauts de Hurle-Vent aura néanmoins gardé ce trait typique des œuvres avant-gardistes, à savoir l'hétérogénéité des critiques à son égard. À cela même on peut imputer la force d'une œuvre pionnière, où l'auteure a su se défaire des limites de l'expression lissée promues à l'ère Victorienne.
À ce jour, Les Hauts de Hurle-Vent garde une certaine fraîcheur: signe que Brontë a avant tout écrit avec le cœur pour une œuvre qui entre dans la postérité.