Dans une interview à donnée à France Culture, Patrick Boucheron disait que l'on avait généralement deux façons de voir notre histoire, soit on s'en embarrassait, soit on le fêtait de façon compulsive. La seconde partie de cette affirmation résonne, dans ce livre, comme une ode à des discours identitaires et partiaux. En traitant des Historiens de Garde, comme les auteurs les appellent, on parvient à décortiquer la logique et les médias de réécriture identitaire de l'histoire. Dans nos vieux mondes européens où le patrimoine et son histoire sont souvent objets de récupération politiques diverses et impertinentes, l'essor de personnalités médiatiques liées à l'étude "grand publique" de l'histoire relève plus de l'audimat que de la démarche scientifique de l'analyse et du sérieux. Les auteurs restent humbles, certes l'histoire n'appartient pas aux historiens, mais ces derniers possèdent les clés qui permettent, dans la plupart des cas, de séparer "réalité historique" de interprétation, et quand interprétation il y a, celle-ci est sujette à la contradiction des pairs et à l'affirmation de la position d'hypothèse de son auteur. Or, dans le cadre médiatique, d'importance de l'audimat et du sensationnel, ce sérieux propre à la méthode scientifique est bafoué au profit d'une logique de "faites nous rêver" et d'une interprétation hasardeuse et partisane de ce qui n'est pas ou ne devrait pas être. Et cela constitue en soit un discours identitaire fort, souvent repris et galvanisant des militants de différentes actions politiques, "légitimant" leur mouvement. Or l'histoire ne légitime rien, elle est une cruelle et inarrêtable succession d'événements.