L'auteur nous embarque aux frontières du monde, dans un décor gris, opaque oppressant, déserté par la nature et par les hommes où seules les âmes en recherche d'absolu ou d'absolution peuvent venir s'y perdre.
C'est donc là, où "même les pierres semblaient souffrir" que vont se nouer trois destins: un enfant, Paolo, façonné à l'image du milieu sédimentaire dans lequel il grandit, un assassin répondant au doux nom d'Angel Allegria ( littéralement "Ange" et "Joie" ) qui tente d'échapper à la justice mais aussi à sa propre violence qu'il ne parvient pas à contenir dans le "monde civilisé", puis arrive Luis poète sensible rêvant de tour du monde mais que sa lâcheté entrave.
L'ambiance y est prégnante, sans être réellement qualifiable, le récit prend des allures de western, de roman noir, avec une pointe de fantastique à la David Almond ( Le jeu de la mort, Glaise etc.) et a ce qu'il faut d'humanisme autour du personnage de Angel qui (je le confesse) m'a fait penser à un Jean Valjean barbarisé.
Je ne compare pas l'écriture bien entendu, et le personnage en question est ici un violent criminel au sang-froid, malgré tout l'auteure a su laisser transparaître l'idée que le destin de cet homme n'était pas scellé par une violence intrinsèque, qu'il pouvait s'en défaire, même si cela n'effaçait en rien ses actes.
Un livre aux images fortes, qui soulève des questionnements, qui laisse la part belle à une interprétation personnelle du lecteur face à l'ambiguïté de la situation. Bref, un livre qui ouvre au monde tout en renvoyant à l'intimité de nos émotions.
Ce roman initiatique a été édité chez Bayard jeunesse, cependant je pense qu'il peut tout aussi bien être lu et apprécié par des adultes et le conseille.