Esther, libraire à Lille, crée un atelier d’écriture dont le but est de mettre en forme ses pensées, parler de ses émotions à travers des lettres, chacun aura deux correspondants, chaque participant n’utilisera que des correspondances pour communiquer.
« Nous ne nous écrivons plus de lettres. Nous considérons qu'elles nous font perdre du temps et nous privent de l'image et du son. Pourtant je savais mieux que quiconque, pour avoir correspondu avec mon père durant vingt-deux ans, que l'on ne dit pas les mêmes choses à l'écrit et à l'oral. »
Cinq personnes vont répondre à son annonce et se lancer dans cette aventure :
Juliette la femme de Nicolas, leur fille Adèle a neuf mois, Juliette ne se remet pas de cette naissance, sujette à des crises d’angoisse, elle souffre de la dépression du post-partum, incapable d’offrir à son bébé la tendresse et l’amour dont il a besoin.
Nicolas chef étoilé, sa vie personnelle est un désastre, mari, amant, père, zéro pointé. Depuis que Juliette est partie, il ne cuisine plus comme avant, il en a marre de tout assumer pendant que Juliette se fait des nœuds au cerveau.
Jean homme d’affaires, directeur général de téléphonie, qui passe sa vie à voyager, indifférent aux gens et aux évènements, il fume trop, il boit trop, ses analyses médicales ne sont pas fameuses. Il a laissé partir sa femme et ses enfants sans lever le petit doigt.
Jeanne ancienne professeur de piano, elle n’a pas de petits-enfants, cela lui manque, elle trouve cela injuste. Elle aime les animaux, a beaucoup d’amis, elle est très active et vivre seule n’a pas que des inconvénients. Elle est une va-t-en-guerre à l’âme sensible, Jeanne a reconnu chez Juliette la vie qui peine.
Samuel il prend les choses comme elles viennent, il n’a pas de projet, n’attend rien, les études ce n’est pas fait pour lui. La maladie de son frère a accaparé ses parents, il n’a eu que des miettes d’amour et d’attention. Il a envie de tout casser.
J’ai été agréablement surpris par l’originalité de ce roman, pour nos dresser le portrait de six personnes cabossées par la vie, Cécile Pivot a choisi la forme d’un récit épistolaire. Tout au long des lettres que chacun va envoyer, Esther, Jeanne, Juliette, Jean, Nicolas et Samuel vont parler de leur passé, de leurs blessures, peu à peu ils vont se confier, se livrer à des inconnus, se poser les vraies questions sur des problèmes qu’ils n’arrivent pas à résoudre seuls. Chacun va sortir de sa zone de confort, les souvenirs remontant à la surface.
L’écriture est simple, agréable à lire. À travers ces six vies, Cécile Pivot insiste sur le pouvoir des lettres qui incitent à la confidence.
Et puis il y a ce magnifique passage sur la cabine du vent au Japon, perdue au milieu de nulle part, les fils de son téléphone sont reliés à rien. Les gens y viennent simplement pour parler à leurs morts.
Une plongée sensible et pleine d’humanité dans les âmes. Chacun va se mettre à nue l’occasion de réfléchir sur le deuil, la maternité, le pouvoir et l’argent, la peur de vieillir et de perdre sa dignité. Un livre d’une grande richesse.
Je remercie infiniment les éditions Calmann-Lévy de m’avoir permis de lire ce roman en avant-première. #LeslettresdEsther #NetGalleyFrance