Un roman épistolaire délicatement nostalgique

Après le décès de son père écrivain, avec qui elle entretenait depuis des années une correspondance régulière malgré leur proximité géographique et leurs fréquentes rencontres, la libraire Esther décide d'organiser un atelier d'écriture épistolaire. Pendant quelques mois, un échange croisé de lettres va alors créer un espace de communication unique et privilégié entre la jeune femme, un couple submergé par une dépression post-partum, un adolescent rongé par la culpabilité de survivre à son frère mort d'un cancer, une veuve âgée percluse de solitude, et un homme d'affaires qui a perdu le sens de son existence : une expérience qui aura un retentissement significatif sur leur vie à tous.


A l’époque de l’immédiateté et de l’hyper-connectivité, cette histoire est une ode à la « slow-communication », une démonstration un rien nostalgique de ce qu’un lien épistolaire au long cours peut avoir d’unique et d’irremplaçable dans la relation entre les êtres : la décantation de nos actes et de nos sentiments au travers de leur mise en écriture, le temps de réflexion qu’autorise et exige l’échange des réponses, ainsi que l’intimité libératrice de ces moments exclusifs et privilégiés que prennent deux personnes l’une pour l’autre, n’ont en effet d’équivalents, ni dans les contacts présentiels, ni dans le jeu de ping-pong des messages numériques.


Ainsi, habituellement emportés par le torrent de leur vie, les cinq élèves d’Esther vont prendre le temps de laisser se déposer les alluvions du quotidien, de se révéler mutuellement avec sincérité et bienveillance, exposant leurs fragilités et leurs doutes à l’écoute et aux questions, dans une démarche aux effets quasi thérapeutiques, en tous les cas, réconfortants par la simple humanité de l’échange. Et c’est avec une émotion grandissante que l’écriture toute de douceur et de sensibilité de Cécile Pivot amène peu à peu ses personnages à surmonter leurs deuils et leurs peurs grâce aux liens de la communication, si joliment symbolisés à la fin du livre par l’émouvante et poétique cabine du téléphone du vent au Japon.


Constat chagrin de la croissante solitude des individus dans une société contemporaine paradoxalement hyper-communicante, ce roman épistolaire délicatement nostalgique vous fera regretter, vous aussi, la prévisible obsolescence des timbres et des boîtes aux lettres. Coup de coeur.


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le 8 oct. 2020

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