Bien qu'il soit un peu oublié aujourd'hui, Peter Bogdanovich a été un réalisateur important dans les années 1970, avec des titres comme La dernière séance, On s'fait la valise, docteur, ou encore La barbe à papa. Mais là où il est encore moins connu en France, c'est qu'avant de passer derrière la caméra, il fut journaliste cinéma, et spécialisé dans les entretiens avec des réalisateurs.
Dans ce pavé de plus de 500 pages sont interviewés pas moins qu'Allan Dwan, George Cukor, Leo McCarey; Fritz Lang, Josef Von Sternberg, Raoul Walsh, et Howard Hawks, les faisant parler de leur cinéma et de leurs films.


La particularité est que ces entretiens sont de taille variables, de quelques pages pour Von Sternberg à plus de cent pour Hawks, dont la passion de Bogdanovich pour l'homme et son cinéma est évidente.
Mais ce qui m'a surtout intéressé, ces réalisateurs avaient terminé leurs carrières ou sur le point de les conclure, c'est qu'on assiste quelque part à la naissance du cinéma en leur compagnie.
En particulier avec Allan Dwan, qui avait plus de 80 ans au moment de ces entretiens, et a donc connu la façon dont on faisait un court, puis un long-métrage au début du XXe siècle, dans cet art qui était au départ méprisé par les gens du théatre, à tel point que quand ils devaient jouer dans des films, ils prenaient des pseudos !


Mais ce que je retiens de ces entretiens, c'est leur étonnante fraicheur, la joliesse qu'ont leurs réalisateurs à parler de ces films souvent vieux de plus de 40 ans, et dans ces cas-là, ils vont peut-être jusqu'à enjoliver des souvenirs, ou tout simplement ne plus se souvenir. Car il faut se rappeler que tout cela était bien avant l'apparition de la VHS, la télévision venait d'arriver dans les foyers depuis quelques années, et que pour ces réalisateurs, qui étaient le plus souvent des employés d'un Studio, ils terminaient un film, puis passaient à un autre sans qu'ils puissent le revoir un jour.
Ces entretiens sont également précédés de courtes introductions de Bogdanovich sur les conditions dans lesquels ils ont été faits, entre un Von Sternberg soucieux que sa voix puisse être enregistrée, au point que les réponses aux questions furent brèves, Leo McCarey qui était gravement malade, Raoul Walsh qui va écourter son interview car ça va en quelque sorte lui donner envie d'écrire son autobiographie, le rapport d'amitié avec Howard Hawks... On sent la volonté de garder la parole de ces gens, dont plusieurs décèderont quelques années plus tard, et ils furent pour certains rarement interviewés.


D'ailleurs, le cinéma de Bogdanovich sera constamment dans la cinéphilie et l'hommage à ses pairs, comme On s'fait la valise docteur, qui est un remake de L'impossible Monsieur Bébé, Nickelodeon qui revient sur les débuts du cinéma, Enfin l'amour qui est un aussi un cri d'amour aux musicals des années 1950, et ainsi de suite.... C'est un réalisateur que j'aime beaucoup, et qu'il faudrait réhabiliter un de ces jours.
Quant à ce livre, qui appelle à une suite, il est non seulement passionnant par les questions posées, qui montrent une véritable connaissance de son sujet, mais aussi des interviewés, qui permettent de garder une trace de l'Hollywood d'antan.

Boubakar
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le 24 mars 2018

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