Les Piliers de la Terre par ngc111
Située à l'époque du Moyen-Age, dans une Angleterre en pleine ébullition créatrice mais aussi destructrice, où les pouvoirs politiques et religieux s'entremêlent dangereusement et où tout un chacun tente tant bien que mal de défendre ses acquis et la moindre once de pouvoir ; l'histoire des Piliers de la Terre propose une richesse typique des œuvres de Ken Follett, avec finalement peu de personnages principaux mais un rapport au temps intéressant qui nous permet de suivre leur évolution avec beaucoup de plaisir.
Certes les destins et les ambitions des personnages, leurs choix et leurs actes sont relativement convenus et surtout très prévisibles, mais l'écriture est limpide, d'une fluidité qui pousse à la lecture jusqu'à des heures déraisonnables et l'on enchaîne les chapitres jusqu'à ce que les yeux disent stop. Il se passe beaucoup d'évènements dans Kingsbridge et ses environs et l'on ne s'ennuie quasiment jamais.
Et ce même si l'on retrouve les défauts de l'auteur britannique comme ces séquence de violence sexuelle nombreuses et inutilement graveleuses, qui rappellent les scènes de sexe dans le cinéma servant à aguicher le chaland. Le sexe en littérature n'est pas un sujet tabou mais là on ressent trop la malice de l'auteur qui tient à s'accaparer un lectorat avide de détails "croustillants" ou vaguement malsain.
Pour rester dans la critique négative, les scènes d'action, qui ont le mérite de ne pas s'éterniser, ne sont pas les plus captivantes.
Hormis cela on ne peut que s'incliner devant le talent de Ken Follett à nous retranscrire les sensations de ses personnages, leur ressenti sur l'autre, sur le danger, sur le remord ou le regret ; devant son sens du détail quant à la création et la représentation des cathédrales, leur majestueuse architecture ; devant l'élaboration parfaite d'une fiction enchâssée dans un cadre historique foisonnant.
On se retrouve vraiment dans cette Angleterre où la civilisation tente une percée à travers une fange poisseuse de villes et villages aux conditions insalubres, où la prostitution s'invite presque partout, où le pouvoir se construit à coup de corruption et de trahison ; mais que l'on ne s'y trompe pas, ce n'est pas forcément mieux maintenant et il n'y pas une victoire par K.O. de la civilisation mais plutôt une victoire acquise au gré de concessions.
Avec des personnages bien ou mal intentionnés (et d'ailleurs toujours un peu égoïstes, même si certains le sont plus ou moins que d'autres) dans tous les camps (politique, religion, civils...) l'histoire évite l'écueil du manichéisme trop prononcé même si certains personnages apparaissent vite comme les grands méchants. On dira que la nuance est plus perceptible chez les "gentils".
Quoiqu'il en soit on relèvera au final la passion que provoque chez son lecteur un tel ouvrage, et ce malgré sa longueur et la densité de son récit. On ne l'élèvera pas au rang de cathédrale mais cela reste du bel ouvrage, bien travaillé et dont on admire l'élégance et la foisonnante architecture.