Ken Follett est reconnu comme un auteur d’intrigues à suspense et d’espionnage mais il surfe également sur l’histoire. Ici force est de constater toute la maîtrise pour sa capacité à nous plonger au coeur du XIIème siècle, pour une Angleterre en pleine guerre civile, faute d'héritier au trône. Une fois encore celle-ci se prête à une description détaillée des luttes entre monarchie et religion où le don de soi ou l’amour du prochain n’a guère de place face à la volonté de pouvoir des uns et des autres, mais surtout une connaissance de la construction des cathédrales comme principal arc narratif en fait son charme principal.
L’aspect technique est ce qui fera de cet ouvrage une plongée dans l’art gothique réussie, permettant de lier ensuite les différentes intrigues. Entre l’alternance de dialogues et rebondissements, un souffle romanesque et la force de volonté, les personnages sont attachants. On suit Tom le Bâtisseur et sa famille, le prieur Philip et sa quête de paix mise à mal par la violence constante retranscrite parfaitement par l’auteur, mais nombre de personnages principaux et secondaires viennent s’ajouter pour détailler cette époque troublée.
Complots, meurtres, vie des moines, étude sociale, et amours avortées, Ken Follett tout au long de ce livre prenant, alterne histoire et fiction, grands moments de bravoure et met en valeur tout autant les femmes que les hommes, tour à tour vaillants, honnêtes ou fourbes ou encore perdus dans leur devoir et leur sentiment.
L’introduction posera d’ailleurs les bases d’ingrédients fantastiques, collant parfaitement au fantasme de l’époque, où ces femmes seulement herboristes à notre époque étaient à la leur, considérées comme sorcières, et le final ravira par sa violence permettant à Ken Follett et les quelques défauts d’un trop grand sentimentalisme parfois, de rattraper le coup.
Traitant tout à la fois de politique et d’économie, mettant en scène la cathédrale de Cantorbery ou celle créée par l’auteur, Kingsbridge, objet de toutes les passions. Des personnalités approfondies et bien amenées au fil de l’intrigue pour nos héros qui se croisent et se perdent pour se retrouver finalement liés les uns aux autres dans une construction narrative fluide et dense mais qui reste simple.
Tout comme Gabriel Garcia Marquez avec «Cent ans de solitude» ou Mika Waltari avec «Sinouhé l’Egyptien», le temps passe au nombre d’années avec une temporalité bien menée où chaque destinée se révèle passionnante. Ken Follett par sa documentation et son sens du détail, offre une écriture visuelle réussie.
L’auteur propose donc une histoire accessible, et malgré quelques prévisibilités arrive à nous passionner pour ces maîtres bâtisseurs, ou en devenir et nous brosser sous couvert d’une période historique un grand roman d’aventures, de culture et une épopée familiale prenante.
Ce roman s’adressera à tout type de lecteur.