Avant d'être un livre sur Dieudonné et Soral, comme le présente Nabe depuis maintenant quelques années, Les Porcs I ressemble surtout à ce qu'aurait pu être le cinquième tome de son Journal Intime. Par chance c'est probablement dans ce registre qu'il est le meilleur.
Nabe détaille minutieusement sa traversée des années 2000, axant son récit sur la percée médiatique de ses anciens "amis" Soral et Dieudonné, mais racontant également les coulisses de son quotidien d'écrivain tricard, ses nombreux passages télé et coups d'éclats médiatiques, avec toujours cette vue de "l'envers du décor", qui donne lieu à quelques révélations croquignolettes.
Il en profite pour se payer la plupart du milieu intellectuel parisien, principalement Yann Moix, présenté comme un loser, queutard, ignare, ex-idolâtre de Nabe, ex-antisémite repenti qui se prend un paquet de merde quasiment à tous les chapitres, mais également Thierry Ardisson, Maurice G. Dantec, Calixthe Beyala, Elisabeth Levy, et bien d'autres. Même Taddéi en prend plein la gueule, présenté comme un abruti inculte s'en référant systématiquement à son maître à penser (Nabe) pour prendre ses décisions professionnelles.
Comme toujours chez Nabe, là où il y a de la haine, il y a aussi quelques éloges, qu'il fait notamment à Tariq Ramadan, Jacques Vergès ou même (et surtout) à Sadam Hussein et Ben Laden, mais aussi à des gens plus inattendus comme Simone Veil ou Claude Lanzmann. On lui découvre notamment quelques amis, notamment dans le milieu littéraire, comme Giesbert et Patrick Besson qui le pistonneront pour le Renaudot en 2010.
Outre les frasques de Dieudonné et Soral, détaillées minutieusement, Nabe revient également sur les événements qui ont fait l'histoire récente de la France et du Monde : les conflits incessants en Israël, l'exécution de Saddam, le scandale de l'Arche de Zoé, l'élection de Sarkozy... L'occasion de se lancer dans de longues digressions plus ou moins bien senties, parfois très touffues, voire indigestes, comme quand il se lance dans un fact-checking minutieux de la mini-série Carlos d'Olivier Assayas sur plusieurs pages. Mais peu importe ce qu'il raconte, Nabe est toujours cet extraordinaire styliste, à l'écriture tout en rythme, en points d'exclamations, en néologismes, en détournements d'expressions idiomatiques.
Le principal défaut du livre (et c'en est un gros), rendant parfois quelque peu poussive et désagréable la lecture de ce millier de pages, c'est la regrettable complaisance avec laquelle il hérisse sa belle prose de torrents d'insultes, la plupart à caractère raciste ou homophobe, d'attaques ad personam ou de descriptions peu reluisantes, principalement physiques, à l'endroit de ses ennemis (chose qu'il reproche d'ailleurs à Soral à la fin du bouquin).
Malgré ça, on arrive quand même assez vite au bout des 1000 pages (notamment grâce à un découpage en court chapitres (au nombre de 319 !)) et on a quand même une grosse envie de lire le second tome.