Les Reliques par jerome60
« On les a isolés. Ici, dans cette cabane en lisière d’un bois, d’une décharge. Près des rebuts qu’on brûle. Le cirque les a laissés ». Hésior le magicien, Zeppo le clown et Nabaltar le soigneur de fauves. Trois hommes abandonnés par les leurs comme des chiens oubliés au bord de la route. Trois hommes unis par leur passion pour une même femme, Mira la trapéziste, leur amante trop tôt disparue. Vivant reclus, hors du monde, ils n'existent que grâce au culte voué à la défunte : « Cousue à l’intérieur, Mira. Sa beauté sauvage, et sauvage le désir de chacun d’eux. Sauvage parce que sauf. Mira est devant eux. Mira sera toujours devant eux. Debout. Nue. »
Je l’aime comme ça Benameur. Lorsque j’ai l’impression de sentir son souffle par-dessus mon épaule pendant que je lis ses mots. Des mots qui me traversent, qui m’irriguent, une langue sensorielle, une écriture à la fois poétique et dépouillée. Trois fois rien pour dire la mélancolie et le manque, la perte de l’aimée et le désespoir. Je n’y peux rien si j’aime les histoires tristes à pleurer, si j’aime qu’à la fin rien ne se règle parce que je garde ancrée en moi la conviction que l’on finira par tout perdre un jour ou l’autre, même si on s’accroche aux souvenirs des jours meilleurs. Et dans ce petit texte, il me semble qu’elle ne dit rien d’autre, avec une grâce et un lyrisme contenu qui n’appartiennent qu’à elle.
Il me semble aussi que c’est un livre de saison, un livre achevé d'écrire le 8 décembre 2004, en baie de Somme. Un livre à lire en hiver, sous le ciel gris et bas de Picardie, avec un temps à s’ouvrir les veines, quand la fatigue vous a mis le grappin dessus et ne vous lâche plus, quand l’humidité s’infiltre sous les vêtements et vous glace les os. Toutes ces conditions étaient réunies en ce qui me concerne et je crois qu’elles ont grandement contribué à l’immense plaisir de lecture que m’a procuré ce texte.