Lu en Novembre 2021. Lecture Édition GF de 1964. 6.5/10


Promenade 1 : Je sens la pâte pré romantique. Ça parle de soi et le monde il est méchant et ça se plaint. Pour l'instant ça me fait sourire, à voir ensuite…
De très belles phrases en tout cas.


"Tout est fini pour moi sur la terre. On ne peut plus m'y faire ni bien ni mal. Il ne me reste plus rien à espérer ni à craindre dans ce monde, et m'y voilà tranquille au fond de l'abîme, pauvre mortel infortuné, mais impassible comme Dieu même." (p39)


"Ces feuilles ne seront proprement qu'un informe journal de mes rêveries" (p40)


Promenade 2 et 3 : « Heureux si par mes progrès sur moi-même, j'apprends à sortir de la vie, non meilleur car cela n'est pas possible, mais plus vertueux que je n'y suis entré. »


Promenade 4 : J-J me brasse sur sa morale et sa vertu en expliquant SON avis sur le bon droit du mensonge bien meilleur que la vérité irréfléchie, mais ça va pas très loin et ce ne sont que des points de vue. Pourquoi ai-je l'impression de lire un écrivain aigri qui se fait passer pour philosophe ? (Probablement parce qu'il est aigri et qu'il n'est pas un grand philosophe).
Sa pensée est consumée par son âge et son christianisme. Donner des leçons de morales aux gens. Dire ce qui est bien et mal. Excuser l'erreur humaine...


Promenade 5 : Y'a du futur René dans cette rêverie. C'était plutôt mignon cette description du rêveur solitaire dans l'île. Mais continuer de dire que les gens y sont méchants parce qu'ils "ne veulent pas le laisser mourir tranquillement sur l'île"... c'est moins mignon, c'est pathétique.


Promenade 6 : Peut-être le chapitre le plus intéressant pour comprendre Rousseau. Mais aussi pour le rendre définitivement détestable. Il se sert de sa misanthropie comme auto-validation de sa théorie sur la nature, et la société qui corrompt les hommes. Il a l'air très malheureux. Mais il est parano et il se fait du mal tout seul. C'est le serpent qui se mord la queue. Il croit que tout le monde le déteste mais il déteste tout le monde.


"Je n'ai jamais cru que la liberté de l'homme consistait à faire ce qu'il veut, mais bien à ne jamais faire ce qu'il ne veut pas." (p119)


« Que ce soit les hommes, le devoir ou même la nécessité qui commande, quand mon cœur se tait, ma volonté reste sourde, et je ne saurais obéir. »


Promenade 7 : "Quel appareil affreux qu'un amphithéâtre anatomique : des cadavres puants, de baveuses et livides chairs, du sang, des intestins dégoûtants, des squelettes affreux, des vapeurs pestilentielles ! Ce n'est pas là, sur ma parole, que Jean-Jacques ira chercher ses amusements" Je ne m'étais pas rendu compte avec quelle facilité il s'adressait à lui même à la P3. Mais c'est très cohérent et ça me fait rire parce que lui est premier degré. Par ailleurs, la description très prosaïque et crue de l'intérieur animal est assez étonnante dans ce contexte.
Promenade où papi Jean-Jacques crie son amour pour les plantes ses seules amies (et encore, parce qu'il n'y connait pas grand chose, ça l'irrite).


Promenade 8 : "Dans toutes les misères de ma vie, je me sentais constamment rempli de sentiments tendres, touchants, délicieux, qui versant un baume salutaire sur les blessures de mon coeur navré semblaient en convertir la douleur en volupté" (p141)


Promenade 9 : "Dans l'extrême misère on se trouve riche de peu ; un gueux qui trouve un écu en est plus affecté que ne le serait un riche en trouvant une bourse d'or" (p160)
Rousseau, à certains égards, précède l'anti-capitalisme, ce qui est intéressant. Il prône une vie simple ce qui est aussi intéressant. Mais il réfléchit bien trop et surtout juge bien trop catégoriquement pour être agréable. Malgré tout, c'était plutôt mignon la démonstration de son amour pour les enfants.


En conclusion, Les rêveries du promeneur solitaire est une oeuvre que je pense intéressante pour comprendre Rousseau. Mais je manque peut être d'un peu de matière sur ce cher Jean-Jacques pour bien comprendre toutes les subtilités de cette oeuvre où il passe quand même son temps à se sentir persécuté, à vouloir être seul, et à se dire malheureux.
Il m'a fait pitié car je le sens sincère dans son malheur, mais quand même, quel intérêt de se victimiser comme il le fait ? Jean-Jacques manque d'orgueil et de courage, il le sait, et ça ne devait pas être facile dans un monde de nobles/grand bourgeois qui vous attendent au virage ; mais le moins qu'on puisse dire, c'est que ça ne rend pas le personnage grandiose, mais bel et bien pré-romantique.
PS : En fait, comme l'indique Jacques Voisine dans sa préface (p25), Rousseau n'avait pas prévu de publier ces rêveries. Et alors, cela prend tout son sens. Si ces rêveries sont un simple épanchement de pensées, un journal intime, c'est illégitime de trouver ça désagréable pour le lecteur. Sa préface qui dé-douane Rousseau (ahah) pour ses paradoxes et son sale caractère joue très bien son rôle. En effet, je me sens bien plus enclin maintenant à trouver un intérêt plus profond dans son oeuvre et sa personnalité, qui, comme toutes, est colorée de nuances.


6.5/10

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le 15 nov. 2021

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