Le Coeur a Ses Raisons que La Raison ne Connait Pas!

La Passion, voila bien la belle affaire du Monde! Cette douce et cruelle illusion qui vous happe par surprise et ne vous lâche plus,vous empoigne et lacère le cœur avec une telle hargne qu'en sortir indemne relève du pur miracle. Le Corps et L'esprit, dans un même élan sacristain, ne forment plus qu'un immense champ de bataille dont il est bien difficile de rétablir la Raison. Toute tentative d'explication serait veine et possiblement dangereuse car elle ne peut se vivre entièrement que dans le mystère. Hors du champ de la théorie, elle est une et indivisible et vouloir lui attribuer un quelconque pragmatisme est contraire a son existence. N'était la folle lubie de L’Être Humain à considérer la vie comme un enchaînement de sens et ainsi élaborer les plus fumeuses recherches sur les événements de notre existence, cet ensorcellement de tous les instants en resterait en l'état de pur coïncidence.

Tel cet adorable enfant, pour qui le destin lui fera connaitre les plus grandes turpitudes de L’Âme. Condamnée au trépas pour s’être dévouée corps et âme au seul amour qu'elle eu désirée, endeuillée par la mort du fruit de sa chaire, elle ne peut se résoudre à quitter les entrailles de la terre sans en enquérir son égocentrique amant. Sa lettre, pleine d'une admirable sollicitude pour celui-ci,transpire la magnifique mais terrible ferveur d'une pasionaria à jamais fourvoyée. De son enfance à Vienne parmi les gens de peu lui revient en mémoire cette rencontre inattendue avec ce resplendissant jeune homme, Don Juan devant l’éternel, aussi cavalier avec la gente féminine qu'elle est innocente de fraîcheur mutine. Ce qu'elle ne nommait alors que comme simple attirance, elle qui ne connait rien des jeux de L'amour Charnel, vaquera alors bien soudainement en obsession tiranique. Ce faisant, rien n'a alors plus d'importance que cette présence chaleureuse et sensuelle. Ses plus belles pensées lui sont entièrement dédiées. Chemin faisant, elle n’aura de cesse d'épier ne serait ce que la moindre parcelle de tissu, objets ou livres lui appartenant, s'imaginant de ce fait lui vouer son cœur entier. Leur itinéraire ne pourra que se croiser, tant la persévérance dont fait preuve la jeune énamourée est intense. De ce jour exquis naîtra le plus inimaginable bonheur qu'elle n'aie jamais connue, mais une si grande audace, aussi insensée soit elle, ne peut que se payer au prix le plus fort. Dans une farandole de va et vient tous plus déchirants qui soient, s'exprimera l'injustice la plus totale d'une union impossible, affreusement gâchée par un inconséquent bellâtre entièrement voué à son seul plaisir.

Quelle est cette si tangible hardeur dont savent faire preuve nos muses les plus désespérées qui ne nous touchent que dune manière neutre? Serait la perception romanesque dont elles font siennes leurs ligne de conduite qui nous effrayent tant,nous autres si peu habitués à laisser transparaître nos sentiments les plus purs? Comment possiblement s'arrimer avec force aux charmes de ces concubines avec tout le respect qui leur est absolument du? Stephen Zweig ne pouvait prétendre avoir possiblement réponses à ces innombrables questions mais il avait pour lui une exquise sensibilité et une tendresse immuable pour les choses de l’Éphémère. Son écriture raffinée n'en efface pas moins son grand talent pour les ravages intérieurs et il faut n'avoir jamais éprouvé une quelconque expérience similaire pour rester de marbre devant ce superbe récit testamentaire.