Je critique Lily et Braine mais cela vaut pour l'oeuvre de Christian Gailly en général, malgré les inconsistances inévitables dans la vie d'un auteur. Gailly c'est d'abord, non pas un style (terme presque péjoratif), mais une écriture, un mélange de fond et de forme que l'on réconnait immédiatement. Une voix faite d'hésitations, de reprises et de contre-pieds. Une tension subtile mais permanente. Quelque chose semble toujours se cacher derrière la banalité du quotidien, tirant le lecteur sur un chemin, au bord du drame. Parfois un évènement arrive, parfois non. Dans ses textes, on respire un air suffocant alors qu'il ne se passe souvent pas grand chose. Il régne une gêne invariable dans l'univers de Gailly. Les personnages sont mal à l'aise ou contrariés, toujours dans une position d'inconfort. Ce qui arrive est tout simplement la vie, cette existence pénible imposée à la naissance, celle avec laquelle on doit "faire avec". Les livres de Gailly ne respirent que par la musique, ce Jazz fiévreux, ou celle de son écriture saccadée. Un plaisir et un relâchement.