Nouveau roman de Kim Stanley Robinson, qui s'inscrit dans la nouvelle veine romanesque que semble vouloir explorer l'auteur américain depuis New-York 2140, à savoir : l'avenir écologique de notre planète, et les questions économiques, notamment à travers une remise en cause des dogmes capitalistes actuels.
Le récit se déroule en 2047, sur une Lune colonisée (majoritairement par les Chinois) alors que l'ingénieur Fred Fredericks vient y livrer un téléphone quantique (dont les conversations sont intraçables et inviolables) auprès du gouverneur Chinois de la Lune.
Tout ne se passe évidemment pas comme prévu, et l'ingénieur américain se retrouve rapidement pris dans les ennuis jusqu'au cou.
La veine technologique et hard scientifique caractéristique de Robinson est ici absente. Bien que la technologie mise en scène y soit très avancée, que ce soit en matière de communication (avec les téléphones quantiques par exemple), d'I.A. ou de transports (notamment pour les aller-retour Terre-Lune), l'auteur ne rentre pas dans les détails, pour se focaliser sur ce qui l'intéresse vraiment : les luttes internes du gouvernement chinois et ce que ce pays, la Chine, peut apporter au monde dans son entier, si le pays décide de vraiment user de sa place de superpuissance.
Un positionnement surprenant pour un auteur américain, qui axe son intrigue autour des questionnements marxistes-léninistes, et du maoïsme, dont on discourt beaucoup dans ce roman (et pas forcément en mal, comme on serait tenté de le croire). Sans mettre de côté les travers du parti communiste chinois et notamment la brutalité avec laquelle il répond aux aspirations démocratiques et aux désirs de changements de la population chinoise, Robinson dépeint un peuple qui, guidé par la philosophie confucéenne, les enseignements maoïstes et l'héritage millénaires de la civilisation chinoise, pourrait changer la face du monde.
En cela, ce roman m'a fait penser à l'auteur Norman Spinrad, qui en son temps, avait écrit plusieurs textes jugés très à gauche, voire communiste aux USA, au point de ne plus être édité aux States, ces derniers romans ayant été directement publiés en France (où il réside depuis 1988). Robinson ne va pas aussi loin que Spinrad dans son "gauchisme", et ne devrait donc pas subir le même sort, mais cela n'en reste pas moins surprenant, car la critique des dérives capitalistes de notre système y sont tout de même virulentes (de même que dans New-York 2140 du reste).
Robinson reste un grand optimiste, et place sa confiance dans le peuple souverain (chinois en l'occurrence) pour faire bouger les choses. Un parti pris qui reste discutable, certes, mais qui a l'avantage d'être présenté de façon suffisamment intelligente pour interroger le lecteur et de laisser libre de tirer ses propres conclusions.
Résulte de ceci un roman intéressant, mais aussi surprenant, tant le cheminement choisi pour le récit prends le lecteur de court à plusieurs reprises et adopte un regard résolument critique sur son pays et étonnamment bienveillant sur son principal rival au niveau mondial.