Enlisement
Un premier roman que confirmeront les suivants : Vincent Almendros écrit simple tout en étant littéraire. Une qualité rare. Je découvre celui-ci après avoir lu les deux autres, peut-être encore...
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le 28 août 2021
Un premier roman que confirmeront les suivants : Vincent Almendros écrit simple tout en étant littéraire. Une qualité rare. Je découvre celui-ci après avoir lu les deux autres, peut-être encore meilleurs.
Le narrateur, 25 ans, est tombé amoureux de son élève, Lise, issue d'un milieu nanti. Ce qu'il aime, c'est cette légèreté, cette grâce, cette aisance en toute chose que sa propre enfance ne lui a pas accordée. Le narrateur a plutôt connu une HLM en bordure de voie ferrée, dont le bruit est élevé au rang de symbole de la misère sociale. J'ai pensé au merveilleux Ivresse de la métamorphose, de Stefan Zweig, où l'héroïne est tirée de sa dure condition le temps d'un été dans un palace en Suisse, découvrant avec ébahissement la douceur d'être riche. Page 97, juste après que Lise a coupé la tête d'un serpent :
Et si j'étais jaloux, n'était-ce pas au fond de l'enfance qu'elle avait eue ? (...) Et observant Lise sous cette lumière nouvelle, son couteau à la main, je me demandais finalement si ce n'était pas cela que j'étais venu chercher en elle, l'insane possibilité de recommencer mon enfance, ou ma vie, loin du chaos.
Le narrateur n'a pour lui que sa culture et le fait de savoir se lever le tôt le matin : c'est sur le petit déjeuner matinal ou sur l'étymologie des mots (en particulier sur l'étymologie du mot étymologie !) qu'il se confronte au père de Lise, Jean Delabaere, qui a fait fortune dans le plastique.
Pour Lise, tout est jeu et, par chance, l'amour en fait partie. Page 52 :
Je vais faire un tour en forêt, annonçai-je solennellement, qui m'aime me suive ! Lise se leva d'un bond, et après avoir ôté ses lunettes, me rattrapa à petits pas sautillants, s'approcha de mon oreille et y susurra qu'elle ne m'aimait pas mais qu'elle voulait bien faire un tour en forêt si on y trouvait des sangliers.
Vincent Almendros ne tombe pas dans le scabreux, façon Lolita. Il nous décrit cette relation par petites touches, juste un baiser, une cuisse effleurée, l'émoi d'un bras sur lui lorsqu'il se réveille qui allume son désir pour Camille, la copine de classe dans tous les sens du mot.
Mais tout cela n'était qu'un rêve, Lise cesse de l'aimer, ou plutôt "elle m'aimait moins" : la phrase est caractéristique du ton de ce roman, qui procède par évanouissements progressifs plutôt que par rupture. D'où le dernier jeu de mots, enlisement, parfaitement pertinent.
7,5
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le 28 août 2021
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