Critique de Shaynning
BD adulte de 2020, "Chinese Queer" est ce genre de Bd qui comporte une forte dimension philosophique existentielle, un côté de critique sociale et un graphisme assez particulier.Faire un résumé de...
Par
le 22 mai 2022
5 j'aime
Incontournable Octobre Roman 2024
Je remercie la maison La Bagnole pour l'envoi de ce service de presse.
Version courte:
Toujours aussi pertinente et actuelle, la gang de la Bagnole reprend sa formule des "première fois" , cette fois sur le thème des peines de cœur. Oui, "peines de cœur" pour inclure toutes les peines, celle des amours qui n'ont pas eu lieu, celle des passions aussi intenses qu'éphémères, celle des amitiés qui se flétrissent ou celle des relations compliquées. Huit auteurs et autrices se donnent le relais pour vous raconter leur première peine de cœur, avec leur style propre et leur humour. Ce que je trouve remarquable, c'est toute la sensibilité et l'humilité de ces auteurs et autrices qui se lit à travers ces pans de leur vie affective posé sur le papier. C'est une œuvre sur les cœurs brisés, certes, mais surtout, sur la guérison qui vient après, sur ses apprentissages et sur ses leçons de vie. J'aime que les amitiés soient célébrées avec une force presque plus grande encore que les amours conjugaux, enfin placés à leur juste valeur. Les amitiés ont ceci de différent qu'ils arrivent avant les relations amoureuses conjugales, qu'elles sont composées des mêmes bases, amour inclut, et qu'elles sont souvent des clés de voutes dans l'identité des individus. Les amitités sont également souvent un baume sur les peines amoureuses. Bref, j'aime toujours autant que des autrices et auteurs parlent des "vrais choses", celle de la vraie vie, le langage des émotions et celui des relations, sans flafla ni sensationnalisme. Parce qu'au final, on adresse un sujet essentiel et incontournable dans la vie de tout un chacun.
Version longue:
Ayant lu les deux précédents ouvrages, le premier sur les "premières fois sexuelles" et le second sur les "premières menstruations", ce 3e livre de la fratrie s'intéresse aux peines de cœur, mais attention! Pas simplement les très classiques "ruptures amoureuses", on s'intéresse à toutes les peines de cœur, incluant les peines amicales et les peines d'amours non-avérés. Dans un monde qui à tendance également à beaucoup genrer ces peines relationnelles, sachez que c'est bien sur une expérience que tout le monde, hommes inclus, peuvent expérimenter.
J'aurais souhaité que le présent recueil présente au moins une histoire avec un jeune homme hétéro comme narrateur, les seules histoires d'amour avec des narrateurs masculins concernent des jeune homme gays. Dans la littérature jeunesse, les histoires de cœur des jeunes hommes gays sont très nombreuses, mais celles des personnages hétéro, du moins de leur point de vue à eux ( d'ordinaire, c'est du point de vue de la fille), sont sous-représentés. J'ai rarement le point de vue masculin hétéro en matière de romance, peut-être en raison du sexisme ordinaire qui veut qu'un personnage féminin soit d'abord "amoureuse", puis peut-être "héroïne", alors que le personnage masculin est d'abord "héros" , puis peut-être amoureux. Bref, j'aimerais bien qu'on ait plus de ce groupe de personnage.
J'adore qu'on aborde enfin ces fêlures qui accablent les gens, jeunes et moins jeunes, dans la littérature jeunesse. Avec sa formule en huit histoires, on prend le temps de donner plusieurs angles à ce sujet. C'est fait avec humour et sensibilité, dans le but de divertir, mais aussi de normaliser, car il est bien un sujet qui se fait régulièrement banaliser ou dramatiser, c'est bien la "peine de cœur". Or, on le sait maintenant, expérimenter une peine de cœur, c'est s'exposer aux conséquences pychosomatiques d'une peine, d'une perte. Ça vient avec des douleurs, une humeur dépressive, une apathie ou même des tendances à l’isolement social, à des degrés variables selon les personnes, bien sur. Ça n'a donc rien de banal. On sait même que c'est la même partie du cerveau qui est impliquée dans le sentiment de manque que les dépendances. Donc, les peines de cœur, dans certains cas, impliquent un "sevrage d'une personne". Avoir une peine de cœur n'a donc rien d'une faiblesse et rien de dramatique, c'est réel et il y a de vrais enjeux. Je vous invite à lire le ludique petit livre jeunesse "Un éléphant assis sur le cœur" de Lucia Zamolo, qui vous expliquera tout ça de façon en vulgarisant.
Donc, qu'avons-nous dans ce 3e Collectif?
"Miroir miroir" - Fabiola N.Aladin
L'histoire d'une ado, Nerlande, qui a de grand monologue intérieurs devant son miroir ces derniers-temps, sous sa grosse armure fictive qui lui pèse de plus en lourd. C,est que Nerlande avait des sentiments pour son meilleur ami, Marvin, qui ne les partage pas. Cependant, pourquoi un amour qui n'a jamais fleuri fait-il aussi mal? A-t-on même le droit de le pleurer? L'histoire de Nerlande, c'est une histoire d'amour non-réciproque, d'une peine d'amour silencieuse et souffrante, sans un quotidien passé à lutter pour ne rien laisser dépasser de cette souffrance. Surtout, c'est une très belle illustration de l'amour fraternel, un amour qu'on a la manie de sous-estimer je trouve, mais dont les racines, quand elles sont saines, ont la solidité d'encaisser les coups les plus durs.
( Vient juste après)
Capsule 1 - Question: Est-ce vrai que la première peine amoureuse est la plus douloureuse?
"Un gros mess" - Marie-Christine Chartier
MC a passé un an aux États-Unis, où elle rencontre un danois nommé Mads ( qui se prononce "Mess"). Et c'est un "mess" en effet. Le beau blond a une copine dans son pays, mais MC a des sentiments pour lui et aimerait bien que son amie cesse de la ramener à cette réalité. Mais, quand Mads reçoit un ultimatum de la part de sa copine comme de son père de rentrer au pays, le jeune homme propose une alternative. Une alternative qui marquera un tournant dans la relation entre MC et lui.
Ah, le classique cas de la fille qui veut un gars déjà pris, il y en a des fictions sur ce sujet. Mais ce que j'aime de cette histoire est que 1- Ça ne finit par en fin heureuse signé Disney, mais surtout en 2, j'ai trouvé très intéressante la réflexion de la jeune femme sur l'implication de ce que propose Mads. Essentiellement, il laisse entendre que si elle le retiens, il pourrait rester en Amérique. Il fait reposer l'entière responsabilité sur ses épaules , sans même que l'amour soit réciproque. C'est, en effet, très injuste comme situation et ça ressemble presque à de l’extorsion relationnelle. Et quand une relation commence à impliquer des gains et des transactions, on est jamais bien loin d'une relation malsaine.
J'admire beaucoup la jeune femme d'avoir su réfléchir et ne pas juste sauter sur l'occasion en ne suivant que ses désirs ( comme beaucoup trop de personnages féminins amoureuses). Un amour véritable, il me semble que ça ne vient pas avec un prérequis. Et c'est là que la peine viens, sur non seulement cet amour déçu, mais sur cette finale amère
( Vient juste après)
Capsule 2 - Rejet ou regret? Lequel est le mieux ( ou le moins pire)?
"I could be your Hiro baby" - Nicolas Michon
Hiro et Ahmed se sont rencontré un soir de party, alors que Hiro vomissait sa vie et Amhed lui tenait gentiment compagnie. Histoire rédigée en textos, avec le français impeccable d'Ahmed et le français rempli de défis d'Hiro, on regarde la naissance d’une relation amoureuse remplie d'humour et de plaisir sexuel. Malheureusement, Amhed va réaliser que son nouveau copain a un vilain défaut: il n'est pas fiable.
Cette fois nous sommes dans la rupture amoureuse houleuse, celle qu'on voit souvent et qui se traduit aussi souvent par un decrescendo aussi spectaculaire que le crescendo: Un amour passionné rapide et une rupture qui l'est tout autant. Un mois en fait. Je crois comprendre que dans cette histoire, en dépit du fait qu'il s'agisse de la première relation amoureuse pour Amhed, il était beaucoup plus mature que Hiro. S'il était prêt à s'investir dans une relation durable, Hiro a semblé plus désorganisé, moins investit. J'admire la maturité du personnage d'Amhed, qui dans sa lettre de rupture ( ah, mais quelle tristesse quand même de faire ça sur son messengers!) a prit tout-de-même le temps de dresser une sorte de bilan de ce qu'il retiens, de ce qu'il a appris, mais également du "pourquoi" de cette rupture. Une chose qu'Hiro n'a jamais fait, ce qui illustre encore une fois le décalage de maturité et d’introspection entre les deux ados.
( Vient juste après)
Capsule 3 - Est-ce qu'il y a une bonne manière de rompre avec quelqu'un?
"Ce qu'on apprend des fins tristes" - Sophie Laurin
Notre narratrice est dans son début de vingtaine et après un certain temps à s'amouracher d'un ami qu'elle estime beaucoup, s'est enfin mise en couple avec lui. Mais la suite n'a rien idyllique. Ils se braquent l'un contre l'autre facilement, évite de parler des malaises, la jalousie s'invite et quand la narratrice demande pourquoi son chum passe autant de temps avec sa chum de fille, c'est pour se faire répondre qu'elle sera toujours là, mais pas cette amie. Elle se sent prise pour acquis. Cette relation ne va que continuer à s'enfoncer lentement, nullement aidée par une vie en commun, jusqu'à l'éclatement.
Il y a beaucoup d'éléments intéressants dans cette histoire de relation, qui a beaucoup d'aspects malsains. Heureusement, nous ne sommes pas dans une de ces immondes Dark romance qui laisse entendre que c'est sexy. Ici, notre narratrice en sort fatiguée, insécure et déprimée. Il lui aura fallu se reconstruire et réapprendre à fonctionner en solo. Mais il se dégage dans son texte un apprentissage salvateur, quelque chose de sage et de lumineux. Elle a su trouver dans cette expérience beaucoup à apprendre sur elle-même et sur ce qu'elle souhaite retrouver dans une relation. Il y a là, il me semble, un narratif nécessaire, car dans les romans, je trouve souvent un gros manque à combler dans les bases des relations. ce sont souvent des relations vides, idéales dans leur forme, mais certainement pas leur fond. Surtout, j'aime que l'autrice adresse ce genre de relation un peu "façade", celles qui ne satisfait pas les partenaires, mais qui persiste quand même , par habitude ou par peur de la fin. J'ai beaucoup apprécié toute cette réflexion qu'elle se fait à la fin de l'histoire et je retiens qu'elle a comprit quelque chose d'essentiel en relation ( surtout chez les filles à qui on leur impose souvent de les oublier au nom de leur amour): Penser à ses besoins. Et penser à ses limites, son confort dans un relation. Un beau message, qui par ailleurs, va bien sur aussi s'appliquer aux hommes. "Soyez biens dans votre relation", il me semble que ce devrait être ça le message général des romances plutôt que de toujours adresser les drames dans une relation. Bref, dans cette histoire, on articule le fait que la peine de cœur est un moment propice à l'apprentissage et à l’introspection autant des émotions que des besoins.
( Vient juste après)
Capsule 4 - Pourquoi des gens veulent rester amis après leur rupture?
"Xavier et Thomas" - Félix Turcotte
Quand Xavier fait la désagréable expérience de se faire sortir du placard de force, alors que son orientation est le sujet d'un petit article dans la rubrique de potins du journal scolaire, c'est un moment passablement désagréable. Surprenamment, un autre ado gay profite de cette situation pour se lier d'amitié avec Xavier. Mais Thomas accapare très rapidement toute l'attention de Xavier, et ce dernier, essoufflé, semble tenir le rythme. Il le faut bien parce qu'entre tous ces compliments, projets, temps passés ensemble, Thomas a bien fait comprendre à Xavier qu'il est "extraordinaire. Pis t,es pognée avec moi pour un esti de boutte." Mais alors, comment expliquer qu'à les fins des vacances, Thomas souhaite rompre complètement toute relation avec Xavier?
Oho, le beau cas de détournement cognitif. Les anglos appellent ça du "gaslighting", c'est une forme de manipulation qui consiste à jouer avec les perceptions de la personne pour le faire douter de son traitement de la réalité. Et c'est une forme de violence psychologique pas encore très connue. Bon, c'est mon avis, j'ignore si c'était le but de l'auteur, mais je trouve l'histoire parfaite pour illustrer ce que peut donner un détournement cognitif. Je pense qu'on peut extrapoler en disant que Thomas avait un besoin ( ou plusieurs) et que Xavier lui a permis de combler ses besoins. Il ne s'en est peut-être pas rendu compte, mais il monopolisait Xavier, sans prendre le temps d evalider ses besoins à lui Vous me direz que c'était à Xavier de mettre ses limites, sans doute, mais en même temps, c'est ça de la manipulation, c'est vicieux et c'est parfois inconscient. Qui plus est, Xavier est un 3e secondaire de 15 ans fraichement sorti de son placard qui reçoit soudain l'attention et l'admiration éperdue d'un jeune homme de 17 ans de 5e secondaire qui est depuis un certain temps sorti de son placard. En terme impressionnabilité, ça se comprend.
Puis, une fois l'été passé, Thomas entre au Cégep, a d'autres priorités et surtout, s'est lassé de Xavier. Là où le tout devient particulièrement tordu est que Thomas laisse entendre assez frontalement que c'est Xavier qui lui courrait après. Là est le détournement: Il altère la perception de Xavier , qui était "je dois répondre aux demandes de Thomas", alors que Thomas le tourne contre lui en disant "Tu es du genre collant et exigeant". Ça ressemble à une projection: Thomas accuse Xavier d'être exigeant alors que dans leur histoire, c'est clairement Thomas qui est collant et rempli d'attentes. Xavier a l'impression de frapper un mur. Ou est donc ce "Tu es pogné avec moi pour un esti de boutte? ( Tu es coincé avec moi pour très longtemps)? Ça sent même un certain niveau d'emprise affective cette histoire.
D'un point de vue psychologique, Xavier est ébranlé, confus, humilié même. Il a de quoi, quand on voit avec quelle violence la situation a fait un 180 degré. Mais surtout, comment rattraper avec son ancien cercle social laissé de côté? Et la peine de cœur qu'il vit est à l'échelle du drame vécu. Xavier s'est vu accusé d'être en torts, pour des éléments qui ne sont même pas dans sa cour, il perd à la fois son ami, son confident, son partenaire et aussi, son idole. Là est le "truc" qui dénote une relation inéquitable, une relation peut-être même toxique au final, dans la mesure où Thomas était un piédestal. Le pauvre Xavier a donc non seulement une peine de cœur affective, mais il me semble aussi réaliser à quelle violence il vient de se faire exposer. Heureusement pour lui, il a pu retrouver une relation saine et sécurisante, celle avec sa meilleure amie. Xavier semble tirer du positif de sa peine amicale, parle de chérir l'éphémère et choisi de pardonner à son ami. Je pense que c'est là une grande différente entre Xavier et Thomas: le premier est empathique, alors que le second m'a semblé égocentrique, voir égoïste. Au final, j'ai vu dans cette histoire un "coup de foudre amical", qui n'était au final pas perçu de la même façon par les deux principaux intéressés. Et je pense que si Thomas était réellement attaché et respectueux de son ami, il aura été honnête, et non pas manipulateur comme il l'a été.
Capsule 5- Comment prendre soin de soi après une rupture?
( J'aime beaucoup cette capsule, ça parle essentiellement de bienveillance envers soi, de processus de deuil et de santé mentale ( dans le sens "d'équilibre psychologique").
"Tout en haut de la pyramide des miettes"- Michelle Lapierre-Dallaire
Michelle a rencontré Mia et son conjoint dans un café. Ils deviennent rapidement ami.e.s et vivent ensemble dans un chalet, dans leur bulle. Mais dans cette danse à trois, reste que Mia forme un couple avec son chum et qu'à travers leur amitié perce un second amour entre Mia et Michèle. Bientôt, leur amour devient un secret au sein de la triade, mais dont le chum semble de moins en moins dupe. Ça ne peut pas durer. Mais Michelle continue d'espérer et d'aimer, Mia ne semble pas vouloir que cela cèsse non plus. Comment dénouer cette situation?
Histoire d'un trio amoureux, aussi une rare histoire avec une rare représentante affichée vivant avec un trouble du spectre de l'autisme (TSA), c'est également l'histoire d'un amour impossible. Du moins, je comprend que Mia ne se donne pas l'option de sortir de son couple et ses motivations restent inconnues. Je lis surtout que c'est lourd un amour secret et que c'est compliqué d'alimenter une relation qui ne promet aucun avenir. Je lis aussi que c'était une relation passionnée et passionnelle, intense et très physique. Je me demande si les histoires passionnelles génèrent des peines de cœur plus intenses? Si je me fis aux autres histoires, pas forcément. J'ai senti qu'il y avait quelque chose de "raté" entre elles, au sens du momemtum. Mia qui dit dans sa lettre qu'elle n'a pas eu le courage de quitter son copain, c'est signe qu'elle aussi a pleurer une relation qu'elle aurait espérer voir continuer? Dans toutes les histoires du recueil, je sens que c'est l'histoire où les deux partenaires sont aussi peinés l'une que l'autre. Il faut dire que c'est aussi une histoire où Michelle à du partir en catimini, sous l'injonction muette du chum de Mia, et donc, ne lui a jamais dit "au revoir". Et ça, c'est bien triste.
Capsule 6 - Est-ce que quelqu'un vous a déjà "ghosté*"? ( *Ignorer intentionnellement)
"Un cœur à soi" - Véronique Grenier
Nous sommes d'entrée de jeu dans une rupture, notre malheureuse ado est donc dans sa peine de cœur dès le début. C'est une histoire courte, en fait, mélange de réflexions et de sensations sur le vécu de la peine de coeur et même un peu des trucs parfois lourds de l'entourage, comme ces irritantes phrases creuses supposées être motivantes. Dans cette histoire, j'aime beaucoup les constats posés à la fin et qui sont à mon sens fondamentales:
"- L'amour a une date de péremption comme tout ce qu'on mange; on est pas obligé de lutter pour lui à la vie à la mort, il s'épuise et c'est sain de le savoir"* ( L'amour évolue également, mais oui, quand il n'y a plus d'amour, ça ne ressuscite pas, pas besoin de se battre jusqu'à l'épuisement, contrairement à ce que beaucoup trop de romances toxiques prétendent en ce moment dans la fiction)
"- Aimer, ce n'est pas s'oublier, vouloir tout donner, se métamorphoser ( comme dans les Twilights, les After, les Palais de rose et d'épine, les dark romance et toutes ces relations toxiques qui grangèrenent nos tablettes en ce moment).- c'est être vu.e, validé.e, reconnu.e" ( Oui, merci!)
"- Ce n'est pas gagnant-gagnant de mettre quelqu'un au-dessus de soi ( Est-ce qu'on peut demande à cette personne de donner des conférences de "C'est quoi une vraie relation [ saine ]" aux autrices de romances malsaines? Parce qu'elle a clairement compris la vie. ^^)
"- Les amitiés valent autant et peut-être même plus que les relations amoureuses" ( Absolument, voir "s'engager en amitié" aux éditions Écosociété, un bijou sur cette question)
Capsule 7 - J'ai le cœur brisé à cause d'une rupture...d'amitié
( Oui, il serait tant de les reconnaitre ces peines amicales, elles sont aussi difficiles à vivre et aussi courantes)
"Le siège vacant"* - Akim Gagnon
*Mention à ce titre évocateur qui me rappelle le "temps du siège vacant" du Vatican, merci "Anges et Démons"!
Notre narrateur évoque une relation amicale importante pour lui et qu'il a, en peu de mots, saboté. Ce qui était d'abord une amitié réciproque s'est peu à peu teintée d'insécurité et d'un complexe d'infériorité, ce qui a invité la jalousie et la possession dans le portrait. Peu à peu, il s'est mit à médire dans le dos de son ami, alors qu'il entrait à la même école secondaire pour leur 4e année. Une situation qui va finir par avoir raison de cette amitié.
Je trouve intéressant de voir un auteur aborder ce thème sous cette lentille de traitement très personnelle et émotive. On voit les rouages de cette mécanique vicieuse qui se met en place, les racines de ces émotions, le changement de dynamique dans cette amitié. Je pense aussi que la communication était un enjeu. D'ordinaire, on traite la jalousie comme un émotion "normale" dans une relation. Or, c'est une émotion qui traduit surtout une relation malsaine, car si la jalousie est là, c'est qu'il y a une insécurité, nommée ou non, et cela engendre de la méfiance, de la possessivité mal placée, du sabotage et pire parfois, de la médisance. Il n'y a rien de bon qui découle de la jalousie. C'est généralement une émotion qui traduit une estime de soi faible, une fragilité relationnelle, une insécurité affective ou que quelque chose est "du". Pourtant, combien de romances ai-je lues où on banalisait cette émotion? Ce n'est pas tenir à quelqu'un de de chercher à le contrôler, que d'estimer qu'il nous est du ou pire, qu'il ne mérite pas d'être aimé par les autres. Rien de bon ne se dégage de la possessivité, de la jalousie et du dénigrement, mais pour une fois, notre personnage assume s'être mal comporter. Oui, il avait clairement des insécurités et des enjeux personnels, cela ne change pas que son ami a souffert à cause de ses manœuvres. Le paradoxe est qu'il ne pensait pas du tout ce qu'il disait, son insécurité alimentait la jalousie qui devenait envahissante dans ses comportements. Pour protéger ce qu'il avait de "plus précieux" , ses mots, il a été jusqu'à détruire sa réputation, et ce, à son insu. Mais une autre émotion est palpable entre les lignes: La peur. C'est inhérent à l'insécurité. La peur de perdre sa relation, cette même relation qui sait risquer de perdre puisqu'il médit sur son compte. Paradoxe, quand tu nous tiens.
Donc, rien de bon ne découlent de ces "émotions" qu'on nous vend comme 'normales", ce n'est pas normal, surtout ce n'est pas "sain", ni pour la personne qui le vit ni pour les gens qui la subissent. J'apprécie que cette histoire l'illustre de manière claire et nullement banalisée ou glorifiée.
Il faut également mentionner que les relations toxiques peuvent concerner les amitiés autant que les relations amoureuses, et même les relations professionnelles, familiales et fraternelles. Aucune relation n'est pas à risque.
Mais plutôt que de s'en servir pour mousser des fantasmes relationnelles déviants ( ces infâmes Dark romances notamment) il me semble que nous devrions nous en servir pour apprendre. Personne ne gagne aux relations inéquitables, insécures et source de souffrances. Parce qu'au final, si j'entends que notre narrateur idéalisait cette relation, elle est devenu un poison pour lui, qui a simplement souffert d'en être encore inclut. Peut-être avait-il peur de la voir évoluer vers autre chose? Cette amitié d'enfance qu'il ne semblait pas vouloir fleurir vers une relation entre adultes, différente, plus mure, mais tout aussi enrichissante? Mais peut-être étais-ce l'expression d'enjeux personnels qui n'ont pas aider à la situation.
J'ai beaucoup aimé cette histoire, malgré son caractère plus "toxique". Si je déplore la glorification des relations malsaines, je demeure convaincu qu'il faut parler des enjeux relationnels malsains, pour mieux les décoder et mieux les traiter.
Et je note au passage qu'il faut du courage pour coucher ce genre d'histoire sur papier, en mettant autant de temps sur les émotions et les comportements.
Il y a un conclusion, ainsi qu'une intro, qui apportent d'autres angles sur le sujet et des réflexions intéressantes. Je ne peux pas les mettre, ma critique est déjà beaucoup trop longue.
En somme, j'ai autant apprécié ce 3e tome que les autres, je trouve la formule fort plaisante et très pertinente, car elle donne plusieurs éclairages et lentilles de traitement à des sujets complexes et diversifiées. Pour ceux et celles qui se le demande, oui, c'est du français québécois, mais non, ce n'est pas illisible ( on lit bien les romans de le France sans trop se perdre, la réciproque devrait être similaire).
Et tout comme les deux autres livres, je me suis aussi faite la réflexion que j'aurais adoré avoir ces livres quand j'étais moi même ado. Je me réjouis donc qu'ils existent pour nos ados actuels.
Bon, à quand un 4e tome sur les joies de l'adolescence au masculin? On a traiter des changements pour les filles dans le 2e, mais en littérature, on a un néant abyssal concernant l'adolescence des garçons dans leur dimension psycho-social et psycho-affective. L'idée est lancée, La bagnole! Un gros merci encore pour ce sympathique livre.
Pour un lectorat adolescent, à partir du 1er cycle secondaire, 12-15 ans+
P.S Concernant le lectorat, oui, la plupart des histoires sont pensées pour des "plus vieux": on a des personnages vieux ados et des jeunes adultes, qui réfléchissent en conséquence. Il y a également l'histoire de Hiro et Amhed qui comporte une dimension érotique évidente, alors le choix de lire le livre devrait être laissé aux plus jeunes ( 10-12 ans) s'ils se sentent à l'aise avec ces éléments.
Sinon, je vous conseille le livre "Un éléphant assis sur le cœur" qui est plus adapté au lectorat intermédiaire du 3e cycle primaire des 10-12 ans et qui est très bien fait ( une sorte de roman graphique mi-fiction mi-documentaire).
Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Les meilleurs livres pour adolescents, Les livres qui changent la vision du monde, Les meilleurs livres sur l'adolescence, La Bibliothèque de Sparkus: Si je devais avoir une bibliothèque privée on y trouverait... et Littérature québecoise
Créée
le 3 déc. 2024
Modifiée
le 9 janv. 2025
Critique lue 6 fois
Du même critique
BD adulte de 2020, "Chinese Queer" est ce genre de Bd qui comporte une forte dimension philosophique existentielle, un côté de critique sociale et un graphisme assez particulier.Faire un résumé de...
Par
le 22 mai 2022
5 j'aime
Second opus de la série qui a gagné le Prix des Libraires du Québec dans la catégorie BD étrangère, "L'ombre de l'oiseau" est plus sombre et profond, mais prend place dans un monde plus élaboré,...
Par
le 23 oct. 2022
4 j'aime
Cette Bd, qui a un format de roman, donne le ton dès sa couverture: deux gars qui sont appelés à se rapprocher malgré des looks plutôt différents. Même les couleurs illustrent d'emblée la douceur de...
Par
le 25 févr. 2023
4 j'aime