L'enquête s'annonce plutôt difficile pour Maigret. Il a particulièrement peu d'éléments auxquels s'accrocher ici.
Résumons un peu (mais pas trop) :
à 4 heures du matin, une belle strip-teaseuse ivre, Arlette, se présente au commissariat pour dire qu'elle a entendu deux clients (dont l'un s'appelle Oscar) projeter l'assassinat d'une comtesse. Puis, ayant un peu cuvé, elle revient sur sa déclaration et dit avoir tout inventé dans un délire. Elle rentre chez elle, où elle se fait gaillardement trucider.
Au cabaret où elle travaille, le Picratt's, personne n'a remarqué les deux hommes qu'elle a décrits (alors que la clientèle est pour le moins clairsemée). Aucune comtesse n'est assassinée. Et l'identité de la jeune femme est volée.
Ca s'annonce vraiment difficile. Et Maigret va devoir déployer tous ses moyens.
L'enquête est plutôt agréable, lente comme toujours avec Simenon mais jamais ennuyeuse. Les dialogues tiennent une place très importante, car ils permettent à l'écrivain de dessiner la psychologie de ses personnages (et aucun n'est laissé au hasard, qu'il soit important ou pas).
L'ambiance grise d'un début d'hiver est très bien reproduite et contribue à cette atmosphère sordide dans laquelle baigne toute l'histoire. Car tout est sordide ici : la boîte minable dans laquelle des jeunes filles paumées se déshabillent devant quelques clients auxquels il s'agit de faire cracher le plus d'argent ; la vie ruinée de hauts personnages ; même les rues de Montmartre sont boueuses et désolées.
Simenon réserve quand même quelques notes d'humour, qui sont plutôt bienvenues. Ses qualités d'écrivain sont évidentes, essentiellement dans la création de ses personnages et dans leur individualisation. Il dresse un caractère en quelques lignes.
Mais si tout est aussi beau, pourquoi une note aussi basse ?
Car le roman possède un défaut majeur à mes yeux : l'homophobie. Un personnage homosexuel déclenche une foule d'insultes de la part de l'auteur (je ne sais pas combien de fois le mot "tantouze" est employé).
Bien entendu, c'était la norme dans la France de 1950 (date de l'écriture du roman). Mais ce n'est pas une raison : les artistes doivent voir plus loin que leur époque.
Ce sera donc - 2 points.