Pour qui souhaite s'accorder un peu de repos entre deux textes exigeants, ce faux roman sans la moindre aspérité présente l'avantage de pouvoir être lu rapidement et dans les conditions les moins propices à la lecture.
Bernard Pivot choisit une certaine facilité en se protégeant derrière un narrateur qu'on nous présente en quatrième de couverture comme lui ressemblant comme deux gouttes de vieux bourgogne, l'eau étant, comme on le sait, incolore, inodore et sans saveur. Ce double est bien entendu un épicurien qui porte beau malgré ses 82 ans et les deux centimètres qu'il a perdus depuis le "conseil de révision" du service militaire ; qui, de Pivot ou de son narrateur, affiche la fierté quelque peu puérile de mesurer un mètre quatre-vingts, on ne sait pas trop ... C'est là la difficulté avec ce type d'écrits qui offrent la possibilité d'émettre des avis qui n'engagent que le personnage fictif. Cela dit, sans doute échaudé par le rappel d'une prestation peu glorieuse aux côtés d'un certain Gabriel M. trente ans plus tôt, l'auteur se garde bien d'énoncer des opinions susceptibles de heurter le lecteur dans ce témoignage sur la vie de seniors exempts de tout souci financier et qui semblent pratiquer l'entre-soi plus que de raison.
Ne soyons pas mauvaise langue, notre narrateur n'oublie pas de signaler, à l'avant-dernière page, il était temps, qu'il aime aussi échanger avec Mme Fofana, sa femme de ménage.
Il ne faut cependant pas bouder le plaisir ressenti plus d'une fois à la lecture de telle ou telle observation, Bernard Pivot n'ayant rien perdu de son humour même s'il apparaît un rien désuet parfois.