Maktub
5.9
Maktub

livre de Paulo Coelho ()

Récemment le hasard, puni soit-il, a placé entre mes mains un petit livre d'une octantaine de pages, signé par un homme que je connaissais tout juste à peine : un certain auteur brésilien du nom de Paulo Coelho. Ce petit Poche résonnait au nom de Maktub, titre apparemment tiré de l'arabe. Du même auteur, j'avais déjà entendu parler de l'Alchimiste, et de plein d'autres ouvrages au nom à rallonge dont je n'ai jamais lu une lettre, mais dont tant de personnes de mon entourage me vantaient les mérites. Face à ce petit tas de feuilles, à peine plus gros qu'un Mein Kampf pour les nuls, je me suis dit « au fond pourquoi pas ? ». Je l'ai commencé assis sur une barrière autour de l'Hôtel de ville, n'espérant pas quelque chose de finement cérébral, mais au moins de rafraîchissant. Grave erreur : ce ne fut ni l'un ni l'autre. Ni quoi que ce soit d'autre non plus.
Par où commencer ? La structure, déjà. Il s'agit en vérité d'une petite série de (très) courts récits, prenant une demie page chacun et n'ayant aucun rapport les uns avec les autres. Vous l'aurez compris, il n'y a aucune intrigue, aucun fil directeur, aucune unité. Seulement un bordel innommable conglomérant un amas d'idées à peine illustrées. Il y en a que ça ne gêne pas, mais gardez à l'esprit que cet « ouvrage » n'aura rien de construit à vous offrir du début à la fin : on le commence et on le finit où on veut sans que ça n'ait d'importance et honnêtement, même le plus banal des recueils de micro-textes aspire facilement à cette prétention.
Mais passons maintenant au fond. Feuilleter ce machin a l'effet incroyable et inédit de pouvoir vous faire ronfler sans dormir. Les mini-histoires, non contentes d'être courtes, se ressemblent toutes. Elles mettent en scène des personnages aussi récurrents qu'invisibles, et se déroulent sur fond de pseudo réflexion philosophique et carrément liturgique. Par exemple, le voyageur doute de sa foi, et un sage curé sort du nulle part du hasard pour lui dire que de toute façon, Dieu le tout là-haut et si puissant est avec lui. Tout se résume à ça. Tout est déjà vu, et déjà trop vu. On a même le droit (difficile d'y croire sans le lire) à la métaphore de la chenille et du papillon. Voilà qui ne vole pas plus haut qu'un exemple de l'introduction de la préface du premier chapitre de la Philosophie pour les Nuls. Et dire que des gens touchent de l'argent pour ça.
Paulo Coelho a réussi à faire ce que nul autre a fait avant lui : inverser le processus religieux : Jésus Christ a inventé une religion, Paulo Coelho en a fait une secte. Les références et clins d'œil clichés pleuvent à la même vitesse que les larmes du lecteur ; à côté, le Nouveau Testament est un traité de métaphore subtil à l'intrigue intense et aux rebondissements imprévus. La morale dégouline sur les marges, et jusque là, je pensais encore que notre cher Popaulo était prêtre, ou moine. Je n'ai jamais vu un laïc brasser autant d'air avec le seul nom de Dieu ; et lire ce bouquin jusqu'au bout, en plus de vous rendre aveugle, vous filera un cancer du sens moral, ni plus ni moins, et vous donnera la plus violente envie d'enfiler un vieux cuir, d'enfourcher une bécane volée et de bombarder un commissariat au cocktail molotov. Le plus effarouché des demi-pensionnaires du Vatican boufferait sa langue avant la dernière page, ou irait se convertir à l'Indouisme. Coelho pense tout savoir et tout connaître et il prouve avec brio qu'il le pense ; tandis que le lecteur s'endort pour oublier.
Clairement, je ne conseille à personne (même pas à mes ennemis) de sacrifier ainsi 80 pages de culture potentielle dans l'espace de son cerveau. Si vous ne l'avez pas, tant mieux. Si vous l'avez, refourguez-le discrétos à un non-averti crédule. C'est d'ailleurs comme ça que je l'ai eu entre les mimines.

Lafeñas
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le 29 janv. 2012

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Lafeñas

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