Ça commence dans un supermarché. Martine Laverdure est une "vieille" caissière, pas assez rapide. La direction veut la virer. Elle a une relation discrète (plus ou moins) avec Jacques Chirac Oussoumo, l'assistant chef du rayon primeurs.
La RH demande à Jean-Jean (le chef de sécu) de poser des caméras discrètes dans le magasin, et de les choper en train de se bécoter sur leur lien de travail, ce qui est interdit et leur vaudra un renvoi.
L'image compromettante arrive rapidement sur le bureau de la direction. Convocation de Martine et Jacques Chirac. C'était sans compter sur le choc d'une telle nouvelle ("vous êtes virés") et la violence qu'elle peut engendrer. Et les dommages collatéraux.
De là, Gunzig dépeint notre monde (ou juste un chouia de SF : les manipulations génétiques permettent aux gens d'avoir des gènes et des caractéristiques d'animaux) : une jungle où la loi du plus fort essaye de régner à tout prix.
C'est une pantoufle agréable que de retrouver l'univers de Gunzig. Qui n'hésite pas à utiliser de grosses caricatures psychologiques pour appuyer son propos et le laisser partir dans tous les sens.
L'histoire est haletante comme un bonne course poursuite de film d'action.
Les personnages sont tous inadaptés d'une façon ou d'une autre, à la société ou aux autres, ou aux deux.
Il y a de l'amour qui surgit, viscéral, lumineux, comme un sauvetage en pleine tempête.
Dans ce roman vous trouverez des loups, qui aiment avoir du sang frais entre les crocs, un serpent qui louvoie tranquillement, aux aguets, à manipuler son monde et à froidement faire sa place, une loutre aimant batifoler et arrêter les fous furieux, un homme fragile, perdu, triste et lâche.
Un système hiérarchique de manager, d'emails expédiés, de réunions, de productivité et d'engrangement de bénéfices.
Un monde où l'on pourrait croire que tout s'achète.
Où Ikea pourrait bien acheter l'au-delà.
C'est drôle, émouvant, plein d'aventures, de rebondissements, de regards clairs, concis, et tranchants sur l'humain. Sans pour autant sombrer dans un manichéisme niais.
Un livre de Gunzig c'est comme un bonbon sucré avec un cœur acide, ou bien une de ceux qui piquent à faire les yeux tout rouges puis qui devient tout doux quand on s'y attarde.