NB : l'édition que je critique est celle de 1954 et non celles, nombreuses et "corrigées", qui suivirent depuis.
J'ai remis la main sur cet album vintage, édité en 1954. Il s'agit du second volet des aventures de Martine, autant dire qu'on est quasi à la genèse de la série.
Alors, comment dire... "autres temps, autres moeurs" avons-nous coutume de dire mais 1954 est aussi l'année de naissance de mes parents et ça me fait vraiment tout drôle de découvrir le "ton" de cet album au fumet colonialiste appuyé. Jugez par vous-mêmes :
- Martine a une amie noire qui s'appelle Cacao,
- Cacao n'est pas décrite comme une amie mais comme une poupée certes formidable mais qui est incapable de retenir son propre nom,
- lorsque les deux fillettes décident de partir en voyage, c'est Cacao qui trimbale la lourde valise et Martine qui s'abrite sous l'ombrelle, ouvrant la marche,
- arrivées au port, les deux fillettes restées sur le quai voient s'éloigner le bateau vers l'Afrique et Cacao est bien sûr inconsolable,
- Cacao est vraiment drôle avec son fichu sur la tête, Martine est très élégante avec sa capeline de paille,
- etc...
Bon, je pense que vous aurez compris que nonobstant la beauté du graphisme, cette édition, lue de nos jours, a de quoi faire bondir de son fauteuil.
"Martine" a alimenté plusieurs polémiques tout au long de sa "carrière" littéraire, notamment sur le fait qu'on apercevait parfois un bout de sa culotte de coton. Personnellement, ce grand personnage de mon enfance auquel je suis très attachée, n'a jamais heurté ma pudeur en dévoilant quelques centimètres carrés de ses dessous, mais par contre, ma morale à moi est vivement heurtée par la narration de cet album et je me pince pour croire que mes parents, à l'instar de toute une génération d'enfants, l'ont sans doute lu et relu dans sa version originale sans probablement en être heurtés.