Max Havelaar
6.3
Max Havelaar

livre de Multatuli (1860)

Non sans défauts, non sans qualités...

J'en avais entendu parler, sans bien savoir de quoi il s'agissait.


Première découverte : Max Havelaar n'est pas un personnage réel, mais le héros d'un roman.
Deuxième découverte : c'est un roman écrit à la diable, un peu comme Tristram Shandy ou Jacques le fataliste, avec des développements erratiques, des apostrophes au lecteur du genre "oui je sais ce que vous vous dites, je digresse, mais"...


Un négociant en café d'Amsterdam, Droogstoppel, mélange de Tartuffe et de monsieur Homais, rencontre un pauvre hère, Havelaar, qui lui remet, au nom de leur camaraderie étudiante, un manuscrit en allemand pour publication. Droogstoppel en confie la traduction à un de ses clercs, fils d'un de ses riches clients. Le livre alterne le récit de l'administration de Havelaar en Indonésie, à Sumatra, et les commentaires affligés de Droogstoppel, qui juge cette critique du colonialisme stérile et dangereuse.


Max Havelaar, soucieux d'enquêter discrètement sur les abus d'un régent (haut dignitaire indigène qui double la faible administration coloniale hollandaise, sera victime d'une cabale de fausses accusations le poussant à la démission. Le livre se clôt sur le brouillon d'une lettre enflammée qu'il veut envoyer au roi des Pays-Bas.


Ce livre contient des pages cliniques sur l'administration coloniale hollandaise. Le lecteur est cependant dérouté par le grand nombre de termes techniques javanais (ou autres) utilisés. De ce point de vue, l'édition a tenu à rester fidèle à celle d'origine, avec des notes de fin de volume rédigées par l'auteur, Multatuli (littéralement "j'ai beaucoup souffert"), mais il aurait été plus pratique pour le lecteur d'avoir un lexique pour éviter les confusions sur des termes phonétiquement proches.


C'est un livre déroutant. Ne vous attendez pas au souci de bon ordonnancement d'un Joseph Conrad. Beaucoup de personnages secondaires ne font que passer, et certains passages sont délibérément étendus, ou au contraire traités de manière elliptique, tandis que des histoires détachées du reste, comme le conte de Saidjal, arrivent et repartent sans crier gare (avec une justification a posteriori). Les intrigues familiales entre Indonésiens sont TRES complexes et dures à suivre, aucune confrontation n'est directe, et le schéma est toujours le même : le petit qui ose porter plainte contre le gros cède à l'intimidation, retire sa plainte et se retrouve à son tour condamné, ou obligé de fuir.


Multatuli ne dénonce pas tant la colonisation elle-même que ses modalités : analphabétisme des Indonésiens, intimidation, vols, travail "gratuit", et des officiers coloniaux aux moyens si faibles qu'ils doivent fermer les yeux, voire adhérer à ce système, que la littérature officielle dissimule sous les rapports lymphatiques.


C'est intéressant, et inspiré de faits réels, mais c'est un ouvrage qui offre bien des niveaux de lecture, sans vraiment faire de choix. On en sort intrigué, un peu lassé parfois par la pause littéraire.


A lire comme une curiosité.

zardoz6704
6
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le 5 juil. 2015

Critique lue 342 fois

1 j'aime

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