Mille femmes blanches est l’un des meilleurs livres que j’ai lu ces dernières années. Publié en 1998, il s’agit du premier roman de l’américain Jim Fergus. Il retrace le destin de May, une jeune femme qui, dans les années 1870, est envoyée dans les plaines de l’Ouest des Etats-Unis pour épouser le chef d’une tribu cheyenne dans le cadre d’un programme visant à favoriser l’assimilation des Indiens d’Amérique au sein de la société blanche grâce à des mariages interraciaux (un tel programme n’a en réalité jamais existé).
Rejetée par sa famille après avoir eu des enfants hors mariage, May se porte volontaire pour échapper à l’asile où elle est enfermée pour ses « péchés ». Bien qu’initialement effrayée par les coutumes « barbares » des tribus autochtones, elle s’accoutume progressivement à la vie en pleine nature et apprend à respecter et la culture des Indiens d’Amérique. Son périple est d’ailleurs collectif autant qu’individuel et les autres « mariées blanches » offrent une galerie de portraits hauts en couleur, de Martha, l’artiste qui dessine des oiseaux à Sarah, une jeune muette qui apprend à parler la langue cheyenne, en passant par Phemie, la Noire-Américaine qui devient guerrière, refusant toute forme d’esclavage et de domination.
May, la narratrice, est le personnage le plus intéressant et le plus attachant. Elle décrit les situations même les plus dramatiques avec humour et clairvoyance, offrant au lecteur une perspective unique sur la vie des tribus indiennes dans l’Amérique de la fin du XIXe siècle. Ouverte d’esprit, indépendante et rebelle, critique des conventions sociales et religieuses, elle fait preuve d’un courage et d’une endurance remarquables à mesure que les conditions de vie se durcissent. Fergus développe avec brio ce point de vue féminin (voire féministe), à tel point qu’on a du mal à croire que l’auteur est un homme.
Mille femmes blanches a une suite, La vengeance des mères, mais c’est surtout le genre de livre qu’on prend plaisir à relire, tant il est riche en émotions et bien écrit.