Mudwoman par BibliOrnitho
Jewell Kraeck (ou Jedina, on ne sait pas trop) est une toute petite fille de 3 ou 4 ans abandonnée par sa mère folle à lier dans un sombre marais fangeux des Adirondack (Etat de New-York). A moitié nue, la gamine – accompagnée de sa poupée – est vouée à une mort certaine à brève échéance quand un homme la découvre et la sauve in extremis. Placée d’urgence dans un foyer temporaire et bien peu confortable, la jeune fille est adoptée quelques mois plus tard par un couple de quakers venant de perdre tragiquement leur propre enfant de 4 ans.
Devenue Merredith Ruth Neukirchen (M.R.), l’enfant connaît enfin l’amour parental fait de câlins, de baisés, d’histoires au moment du coucher et de mots d’encouragement. Mais on sent rapidement que cette belle existence est fausse, qu’Agatha et Konrad Neukirchen se sont offert une enfant de remplacement, que la fillette abandonnée n’est pas aimée pour elle-même mais à la place de l’autre. A long terme, cela peut-être déstabilisant.
Mais « Merry » s’est révélée d’une intelligence peut commune, brillante. Major de sa promo au lycée, elle décroche une bourse pour la grande Université de Cornwell (parcours exceptionnel à la sortie d’un petit établissement de province), puis une place à Harvard d’où elle sort après avoir décroché un doctorat en philosophie. Devenue la première femme présidente d’une grande Université du New Jersey (université qui n’est pas nommée), M.R. est au faîte de sa carrière. Mais une virée sur les lieux de son enfance et de sa tragique découverte fait remonter en surface un traumatisme enfoui et non cicatrisé.
Dès cet instant, M.R. part en vrille. Le surmenage (elle est un bourreau de travail), de graves difficultés au sein de son établissement font que la quadragénaire qu’elle est devenue perd pied. La folie, dans bien des cas, peut être congénitale. Le lecteur imagine la démence maternelle atteindre alors la fille à quatre décennie d’intervalle. M.R. s’enfonce, perd le sommeil, fait des cauchemars, confond la réalité avec un monde fictif et agressif qui l’envahi. Paranoïa, schizophrénie s’emparent d’elle. Jusqu’à la rupture !
Une décente aux enfers décrite avec lenteur par l’auteur. Un livre qui se résume la plupart du temps à un essai sur l’Université américaine. Certes, Joyce Carol Oates est bien placée pour nous parler de ce monde qu’elle connaît si bien. Mais le rythme du roman s’en ressent grandement. J’ai eu trop souvent l’impression de bla-bla, de remplissage, de redite. De tout ce bavardage que JCO a toujours su éviter.
Un récit très inégal, mêlant des scènes de vie sur le campus et la chute inexorable de sa dirigeante. Un roman (bien écrit) que j’ai trouvé décousu, avec une atmosphère oscillant entre une vague gène à peine dérangeante au gore pur jus que Stephen King n’aurait pas désapprouvé.
Après le fade et mystérieux Mr Kidder paru en mars dernier, ce livre annoncé comme un « géant parmi les grands romans de Oates » est une nouvelle déception. Note : garder à l’esprit que ce genre de dithyrambe est rédigé par des commerciaux et non par des critiques littéraires. Note n°2 : un bon bouquin n’a pas besoin de tralala pour se vendre et que toutes ces éloges excessives peuvent cacher un nanar. Note n°3 : revenir à mon habitude de ne plus lire les quatrièmes de couverture.