Notre île sombre , ou Fugue for a Darkening Island dans la langue de Theresa May , est un roman d'anticipation par Christopher Priest , réécriture d'une oeuvre de 1971 nommé le Rat Blanc. Priest c'est un de ces écrivains plus ou moins majeur des littératures de l'imaginaire , composant des récits d'apparences originaux sur des notions proche comme la subjectivité et la distorsion du réel. C'est à ce titre de détricoteur de la réalité que ce monsieur a été surnommé " le nouveau Philip K. Dick" - une appellation sur laquelle je reviendrai après le résumé...
Notre île sombre nous conte , à la première personne , l'errance d'un homme , Alan Whitman , dans une Angleterre aux prises avec une guerre civile. A travers les soubresauts de sa mémoire explosée , l'ancien universitaire nous raconte sa vie d'occidental paisible , avant et après qu'une guerre nucléaire ait ravagé le continent Africain. Ce ravage entraîna dans son sillage une exode massive des populations vers les pays du nord qui passeront , au fil du temps , par trois étapes : la xénophilie , la xénophobie et enfin la sécession.
Une histoire , vous l'aurez compris , délicate. D'une part , parce que nous connaissons des flux migratoires similaires et d'autre part , parce que la neutralité est rarement admise dans de tels récits , malgré une écriture - et une traduction - des plus fluides , nous donnant parfois l'impression de skier entre les pages et les souvenirs de cet homme de la classe moyenne tiraillé entre ses manques de convictions et...sa bite. En effet , Alan Whitman est un gros dégoûtant ; je tiens à prévenir tout ceux qui comme moi se lasse facilement des longues scènes descriptives d'actes sexuelles qu'on est ici au pays du bon gout. C'est d'ailleurs un ressort dramatique assez évident : Alan ne peut se concentrer sur ce qui se passe dans son environnement - de sa relation tendue avec sa femme au chaos social ambiant - parce qu'il est , et ce depuis son plus jeune age , une sorte d'immense raclure décadente d'intellectuel.
Ceci entraîne une seconde étape de réflexion. De quoi parle ce livre ? De la condescendance des pays du nord vis à vis des pays du sud comme voudrait nous le faire croire la quatrième de couverture , ou plutôt des craintes d'un écrivain blanc face aux gens de couleurs se pressant sur le pas de son île ? Notre île sombre est elle une critique dissimulée du colonialisme , comme La guerre des mondes le serait , ou un manuel à destination des parties d’extrême droite Européens ? Certains forums prétendent même que ce roman - de SCIENCE-FICTION , je tiens à la préciser- passerait de mains en mains entre les pontes des partis radicaux de notre bon vieux continent...Que penser alors ?
Loin d’être réellement raciste , quelques scènes de ce livre peuvent prêter à confusion , ou viser terriblement juste. Entre les scènes d'expropriations brutales par des groupes de réfugiés Africains surarmés , et celles où notre anti-héros blanc rempli à la perfection le cahier des charges caricatural qui lui échoit , on flirte constamment avec un vertige qui n'est pas sans rappeler celui que Philip K.Dick insère en nous après chaque lectures. Voila peut-être le seul lien littéraire que j'ai pu déceler entre Priest et Dick. Bon , le monsieur est aussi l'écrivain derrière le film Le Prestige qui est lui aussi une expérience Dickienne évidente , mais il n'y a pas d'autres rapports.
Une lecture qui ne désigne ni ami , ni ennemi est une lecture assez déstabilisante. Je ne sais pas , mais peut-être que si le héros n'avait pas été aussi détestable j'aurai pu donner à ce roman deux étoiles supplémentaires.
Ce n'est pas le cas , je tiens à appuyer ma note qui est tout de même une preuve de générosité de ma part.

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le 27 janv. 2017

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