Nouvelles histoires extraordinaires par Diothyme
Ce livre est un ensemble de nouvelles, j'ai choisi de vous en résumer deux, l'une très connue et l'autre non, afin de vous donner un aperçu de l'ensemble de l'œuvre.
Le cœur révélateur:
Le narrateur nous conte son histoire à la première personne. Nous rassurant tout d'abord sur sa santé mentale, et cela à plusieurs reprises. Son crime, avoir tué un vieillard avec qui il vivait. Sa motivation n'a pas été l'argent, ni le goût du sang, pas moins qu'une certaine vengeance à assouvir. Il ne pouvait tout simplement plus supporter l'œil du vieil homme, bleu, couvert d'un voile, qui semblait le défier à commettre l'acte. Il prémédita bien l'assassinat, s'introduisant, chaque nuit un peu plus loin dans la chambre de son colocataire, armé d'une simple lampe de poche sans que celui-ci ne se réveille. Un soir, par la porte entrebâillée, le rayon lumineux balaye le visage de l'ancêtre, et cette-fois-ci, ses yeux ne sont pas clos, et il éclaire directement l'œil tant haï. Ce qui finit de rendre fou le nocturne prédateur, il se jette sur sa victime et l'étouffe dans son lit, il n'aura le temps de pousser qu'un seul cri avant que son cœur ne cesse de battre. Une fois la besogne accomplie, le meurtrier, ne perd pas son sang froid et décide de cacher le cadavre pour que son méfait ne soit pas découvert, il commence par le démembrer et cache les morceaux du corps sous les lattes du plancher. Enfin, il nettoie soigneusement le sol pour ne laisser aucune trace du crime. Les voisins alertés par le cri, eurent tôt fait d'appeler les forces de l'ordre, qui se présentèrent le lendemain même au domicile des deux hommes, l'assassin, sûr de lui, les fait entrer et visiter la maison, prétextant que son colocataire s'est absenté pour un voyage. Il pousse le vice jusqu'à faire assoir les policemen au dessus même du mort, tant la confiance en son crime parfait est grande. Quand tout d'un coup, un étrange son se fait entendre, le battement d'un cœur, il semble venir de sous le plancher. Bouleversé, le meurtrier tente de faire diversion, mais le bruit continue, il finit par craquer et avoue tout aux policiers. Hallucination due à la culpabilité ou poltergeist en quête de vengeance? Seul Poe détient la solution de ce mystère.
Le diable dans le beffroi :
Le petit village Hollandais de Vondervotteimittiss est une véritable carte postale, des petites maisons régulières où des femmes aux joues rondes font cuire le chou dans la marmite pour nourrir leurs deux enfants qui jouent avec le chat et le cochon dans le jardin. Les hommes eux, ont pour tâche de surveiller la grande tour de l'horloge de la ville, qui, de toute façon , n'a jamais eu une minute de retard, mais qui sait? A part les choux et les horloges, les citoyens n'ont pas beaucoup d'intérêts, mais ils sont très heureux comme ça.Tout le monde porte sa montre, même les animaux de basse-cour. Jusqu'au jour où, à quelques minutes avant midi, arrive dans la ville un petit homme au teint foncé, au long nez crochu, sautillant en jouant d'un violon beaucoup plus gros que lui. Lui seul semble trouver une cohérence entre sa musique et la chorégraphie qu'elle lui inspire, ce qui crée une sainte horreur aux bourgeois de la ville, pour qui le rythme est sacré. Il portait également un habit noir à queue d'hirondelle et une énorme tabatière en or, où il puisait incessamment du tabac entre deux cabrioles. Il se rendit droit vers la tour de l'horloge et devant les villageois stupéfaits, donna une raclée carabinée à l'homme le plus important de Vondervotteimitiss, évidemment l'heureux veilleur de la tour. Et la noble cloche sonna midi, ce qui soulagea, les habitants. Sauf que... Aux douze coups de midi en succédèrent un treizième, et là catastrophe, les enfants se sentirent mourir de faim, les femmes crûrent que leur chou était brûlé, et les hommes de bourrer leur pipe jusqu'à ce que la vallée se couvre d'un noir nuage de tabac. Les habitants devenaient fous, ils n'avaient plus aucun repère sans leur précieux temps, et le petit démon continuait de sonner les heures, trop ravi du chaos qu'il occasionnait.
Ces nouvelles histoires extraordinaires sont grandement marquées par l'image de la Mort, il n'y a qu'une ou deux nouvelles où il n'y est pas fait directement mention, dans toutes les autres c'est le thème principal. J'ai trouvé une gradation dans l'ordre des nouvelles, les premières tournent autour des crimes et du sentiment de culpabilité, elles me rappellent beaucoup Crime et Châtiment de Dostoïevski. Dans la seconde partie du livre se trouve les nouvelles que j'appellerai les "farces", qui me font penser aux contes régionaux traditionnels, en un peu plus sombres. La troisième partie traite elle plutôt de la vie après la mort, avec de fortes références au monde grec antique. On sent la dichotomie qui écartèle l'auteur, entre la fascination pour l'au-delà et une peur qui le ronge, sûrement due à son passé (il a vu sa mère mourir de tuberculose à trois ans et ses amours décédèrent les unes après les autres comme si une étrange malédiction les frappait). Sauf les deux dernières nouvelles qui sont difficiles à classer, mais qui elles aussi traitent de la Mort, qui obsède tant Poe. J'ai regretté que certaines nouvelles se ressemblent vraiment, les scénarios où la personne est cataleptique et qu'on l'enterre en la croyant morte et évidemment, elle ressort de sa tombe pour se venger, une fois suffirait... Cependant le style de l'auteur, doublé de l'excellente traduction de Charles Baudelaire me laisse pantoise, c'est un véritable délice à lire, même si c'est un peu désuet aujourd'hui. Malgré le thème redondant du livre les histoires sont magnifiques et profondes, toutefois, j'ai préféré le premier volume : Les histoires extraordinaires plus "policières" que cet ouvrage-ci, qui lui me paraît une tentative d' introspection pour Poe, plus poétique et philosophique que ludique.
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