Une histoire de lecteurs, d'écrivains et de protagnistes

Difficile de poser des mots pour exprimer mon ressenti sur ORV. J’ai des sentiments très partagés à l’égard de cette œuvre que j’ai découverte via son Webtoon (manga Coréen en ligne), tout récent (2020) qui adapte à peine 10% du récit. Le roman se divise en effet en 5 parties assez dense (la dernière étant un épilogue de pas moins de 50 chapitres) et de qualités inégales.


La première partie pose un cadre qui laisse supposer un univers fascinant (le fameux world building) aux moult secrets à peine éraflés. Il y a des constellations qui observent des incarnations traverser des scénarios diffusés par des Dokkaebi sur le réseau <Star Stream>. Nos héros ont des pouvoirs, ils peuvent augmenter leurs niveaux façon RPG, ils choisissent des sponsors parmi les constellations et cherchent à acquérir des [fables]. Le personnage principal, Kim Dokja, sait tout de ce monde (il a en effet lu un roman de 3551 chapitres qui relate l’aventure de Yoo Joonghyuk traversant ces mêmes scénarios) et dilue ses connaissances au lecteur avec parcimonie. Le cadre est assez classique avec les 7 rois de ceci, les 100 plus fort du monde, les 5 dieux de cela, mais j’apprécie ce genre de construction. Le teasing est fort, les enjeux multiples, j’ai tout de suite accroché à cet univers plein de promesses et ai dévoré cette première partie avec passion.


Les seconde et troisième partie continuent sur la même lancée. L’intrigue s’étoffe et nous apporte quelques réponses qui amènent d’autres questions, beaucoup d’autres questions « comment fonctionne le <Star Stream> », « qui sont les Seekers of the End>, « quelle est l’identité du Conspirateur Secret> », « comment se sont déroulées les dernières régressions de Yoo Joonghyuk », « pourquoi les constellations suivent les scenarios avec autant d’attention », « quid des dieux d’un autre monde » … D’innombrables questions qu’il va falloir finir par adresser (la partie trois coure jusqu’au chapitre 372 quand même). Et c’est là que le bât blesse, quand on découvre que les fondations qui sous tendent ORV sont en papier mâché. Tout a commencé à s’écrouler pour moi à ce moment-là. J’ai peu à peu réalisé que le propos du livre n’était pas tant d’avoir un vaste univers cohérent mais de raconter une histoire, celle de Kim Dokja, quitte à délaisser toute rationalité et sens critique.


Dès lors, ça a été un chemin du combattant pour continuer à lire cette partie 4. J’ai commencé à entrer en désaccord avec les personnages, dont les réactions m’ont parue parfois improbables, bien souvent stupides. J’ai trouvé que l’action devenait redondante, creuse, pour ne pas dire aberrante. Ce qui m’a motivé à aller jusqu’au bout, c’est l’attachement que je ressentais pour le personnage principal que je suivais depuis des centaines de chapitre. Je voulais aussi comprendre, voir cette fin qu’on nous dessine depuis le début, atteindre la fin des scénarios.

Aujourd’hui, je ne sais pas si j’ai bien fait de continuer. Peut-être aurais-je dû m’arrêter, tant qu’il en était encore temps, geler ORV dans une sorte de stase et l’édifier au panthéon des œuvres magistrales, dont les univers existent toujours, vibrants, à portée de main. Je pense aux mondes de One Piece, d’Harry Potter ou de Breaking Bad.


Courte mention pour l’épilogue (cette partie 5) qui se concentre principalement sur les personnages secondaires, et décrit un récit ponctué d’aller-retour abscons sans saveurs. Cette lecture avait des airs de purge. Heureusement que le final (et le message porté par cette conclusion Meta) vient rattraper ça.


Bon, quand vient l’heure de faire le bilan, qu’est-ce que je retiens ?

Un récit prenant, des moments d’une intensité épique

la gigantomachia, le banquet des constellations, le combat contre Surya, ce moment où tout le monde se met à financer Kim Dokja Company

des personnages aux noms agréables

Demon like judge of fire, Demon king of salvation, Ruler of the deepest pit, Prisoner of the golden headband, Secretive plotter, Abyssal black flame dragon

ce système d’écriture ponctué de [notifications] décrivant l’état émotionnel des gens, et … voilà en fait.


J’ai l’impression d’adorer ORV, chaque scène du livre s’accompagne d’un de mes moments de vie de ces 4 derniers mois où je lisais, dans les transports, à la plage, sur mon canapé ou aux WC. C’est ça qu’on cherche aussi en lisant, nouer la fiction à la réalité. D’un autre côté, je suis hyper déçu et frustré de l’histoire. Les explications de l’auteur n’ont pas de sens à mes yeux et je considère que la plupart des situations découlent de comportements absurdes des personnages. Sans compter les nombreux éléments de foreshadowing (l’art de lâcher un semblant d’information sur un évènement qui va arriver par la suite du récit) qui n’ont pas aboutis.


Peut-être avais-je mal positionné mes attentes. Peut-être que je n’arrive pas à m’adapter à la culture Coréenne. Peut être que j’en attendait trop d’un Webnovel (roman diffusé sur une plate-forme en ligne, jour après jour, chapitre après chapitre). Peut-être que ce genre de récit n’est pas pour moi finalement.


Quoiqu’il en soit, je garderais un souvenir joyeux de ces heures passées en compagnie de Kim Dokja.





siegeauto
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le 9 nov. 2022

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