Parlons travail par MarianneL
J’aimerais rendre hommage à celui qui m’a conseillé de lire ce livre de Philip Roth, ouvrage publié en 2001 et en 2004 pour la traduction française, mais son nom s’est hélas perdu dans mes notes éparpillées.
Distillations de conversations avec des écrivains, Primo Levi, Aharon Appelfeld, Isaac Bashevis Singer, Milan Kundera, Ivan Klima en particulier, souvenirs de l’auteur à propos de ses rencontres avec Malamud ou avec le peintre Philip Guston, et enfin relecture des romans de Saul Bellow forment un livre passionnant sur la chose littéraire qui appelle de nombreuses lectures ou relectures.
Comme des personnages en proie à l’insatiable curiosité de Philip Roth, les écrivains sont ici replacés dans leur contexte. L’auteur retourne, à sa demande, avec Primo Levi visiter l’usine chimique dans laquelle celui-ci a travaillé. Il évoque la maison d’Aharon Appelfeld dans les environs de Jérusalem, paradis domestique aux antipodes de l’enfer qu’il a vécu dans son enfance, orphelin traqué fuyant les camps, se cachant dans la forêt en Ukraine.
Les facettes de ce livre sont multiples, creuset dans lequel se croisent et se fondent les sources de l’inspiration, les parentés littéraires avec en particulier de nombreuses pages magnifiques sur Kafka, l’identité juive, l’exil ou l’attachement à la terre d’origine, les conditions politiques avec l’évocation du régime tchèque avant la chute du mur.
On pourrait commenter ce livre très longuement tant il est riche. Parmi toutes ces richesses, Philip Roth m’a en tous cas donné envie de lire et relire tout Saul Bellow, avec ce texte évoquant ses romans qui se dévore comme un délice, qui rend si bien l’effervescence littéraire qui règne dans son œuvre, les hauts et les bas de l’auteur qui transparaissent dans la succession de ses romans, la description brillante des facettes multiples de ses personnages en proie aux turbulences de la vie.
Voici une mise en bouche, extrait du commentaire sur Herzog : «Amant sur le retour affligé d’une vanité et d’un narcissisme colossaux, il s’aime d’un amour vache. Tourbillonnant dans la grande lessive d’une conscience de soi un rien excessive, il se laisse charmer, au nom de l’esthétique, par tous les êtres qui débordent de vitalité. Bouche bée devant les brutes et les dominateurs, le je-sais-tout caricaturaux, leurré par leur assurance apparente, leur autorité primaire, monolithique, il se nourrit de leur intensité au risque d’être détruit. Tel est Herzog, la plus grande création de Bellow… »
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