Ecrit en 2006, « Partir » de Tahar Ben Jelloun nous décrit le Maroc d’aujourd’hui, pays envoûtant et désespérant. La jeunesse est sacrifiée par la misère et le chômage, et le poids des traditions est trop lourd pour ces jeunes souvent diplômés. Vu de Tanger, l’Europe est toute proche, les côtes espagnoles sont à moins de quinze kilomètres. Alors on passe le temps en observant la Méditerranée, en sirotant des cafés, en fumant du kif, en attendant le passeur et en pensant à ceux qui sont morts en essayant de traverser dans des barques surchargées. Ils sont des milliers de musulmans à rêver d’aller s’installer loin des imams et de leurs fatwas, loin de ce pays sans travail, loin de la corruption. Ces jeunes arabes nous ressemblent, ils veulent travailler, rencontrer des filles et boire des verres entre potes, s’amuser. Azel, le héros du roman, va partir, il sera aidé par un vieil homosexuel généreux qui l’installera chez lui en Espagne. Mais Azel aime les filles, il aime s’amuser et a soif de liberté. Contraint de quitter la maison de son ami, il va retrouver la galère, le manque d’argent et les problèmes de logement. Son pays d’accueil est loin du paradis qu’il imaginait lorsqu’il était encore chez sa mère à Tanger. Comme beaucoup de migrants, il traine dans les rues, a de mauvaises fréquentations, il est une proie facile pour les rabatteurs d’Al-Qaïda qui font croire à ces pauvres malheureux que provoquer l’Occident les mènera au paradis. Ces prêcheurs sont habiles, chaleureux, réconfortants, ils ne pratiquent pas l’islam, ils utilisent la religion. Pour Azel l’aventure finira mal. C’est passionnant et affolant.