Lorsque les hasards de la vie m'ont amenés à rencontrer Régis Descott, j'étais loin de m'imaginer qu'il était l'auteur de thrillers d'une telle qualité. Le thriller traitant de serial killers est devenu une mode littéraire française ces dernières années. Il faut dire que l'Hexagone avait un retard considérable à rattraper, notamment par rapport aux auteurs anglo-saxons et scandinaves. Dans toute précipitation, il y a forcement beaucoup de déchets que nombre d'éditeurs en mal de part de marché n'hésitent pas à produire. Mais il n'est nullement question de cela ici.
« Pavillon 38 » est le premier thriller de Régis Descott - car l'auteur a déjà écrit un premier roman, historique celui-ci et intitulé « L'empire des illusions » - et il répond admirablement à la définition du thriller tout en gardant le délicieux ton du roman policier à la française. Tous les ingrédients sont là pour nous donner le frisson attendu. Le détraqué qui menace l'ordre social, le journaliste fouille-merde qui met tout le monde sur la piste, la psychiatre qui se sent impliquée par les errements de son patient et le policier tenace, bien déterminé à mettre fin à l'œuvre criminelle en cours.
Ainsi lorsque Dante est interné à l'UMD, le docteur Lohmann le prend en charge. Dans cette unité psychiatrique très particulière, on soigne les aliénés présentant une très grande dangerosité pour la société. Dante a été arrêté juste avant de commettre un crime terrifiant. Dans ce genre de service, l'attention de tous les personnels doit être au maximum car tout peut déraper très rapidement. Suzanne Lohmann se donne à fond dans son métier. Ca lui permet d'oublier l'arrogant chirurgien esthétique avec qui elle est mariée. Et même si ses confrères masculins ne lui font aucun cadeau et font tout pour succéder au directeur de l'institution à sa place, elle se bat et trouve sa motivation vitale dans la réussite de ses traitements.
Et Dante est une de ses réussites. Il quitte le pavillon 38, là où se trouvent les plus dangereux, au bout de quelques mois. Ses progrès seront si rapides qu'il pourra sortir rapidement de l'UMD et intégrer une cellule ordinaire de Fresnes pour y purger le reste de sa peine. Ses anciens rêves de meurtres où le Serpent est omniprésent vont peu à peu s'estomper. Si bien qu'il retrouvera la liberté et un début de vie normale, jusqu'à l'incident.
Lorsqu'on retrouvera le cadavre d'une femme atrocement mutilé, le Serpent va ressortir de l'ombre. Le journaliste François Müller a déjà vu ce genre de crime au travers de toute l'Europe. Les circonstances amèneront Suzanne Lohmann à penser à Dante et l'inspecteur Steiner va se mettre en chasse. Ils retrouveront facilement Dante, après une de ses rechutes, mais est-ce vraiment lui l'auteur des crimes ou n'est-il qu'un maillon, voire une victime, de cette chaîne criminelle ?
La disparité d'intérêts, de vies et de caractères des différents protagonistes de cette histoire permet à ce roman d'être le cocktail détonant qu'on attend d'un thriller. Régis Descott s'est richement documenté sur le milieu et les pathologies de la psychiatrie. Cela donne au récit une légitimité tout en rendant certains passages trop techniques pour le lecteur. On se perd parfois dans le récit, mais l'essentiel est que l'histoire ne connait pas de faille insurmontable. Un premier thriller enthousiasmant qui vous permettra de découvrir un jeune auteur qui risque de devenir une plume bien affutée du thriller. On retrouvera également avec plaisir le docteur Lohmann dans le second thriller de Régis Descott intitulé « Caïn et Adèle » dont je vous parlerai prochainement.