Bobby a 15 ans en 1970. Pensionnaire dans un établissement de renom, il a réussi à s'extraire de Pittsburg et d'une vie rythmée par rien d'autre que la cyclothymie maternelle.

Mais alors qu'il profite de cette néo-liberté, la route de son dépucelage croise celle d'un coiffeur manchot. Il est renvoyé à Pittsburg et aux angoisses des robes à bustier de sa mère.

Un échec inconsciemment anticipé, il n'en n'est pas déçu. Bobby est en ce temps là un fataliste amer, et résigné.

L'espoir d'un mieux renaît, lorsqu'il fugue avec Michelle, un amour d'enfance. San Francisco terre d'asile ? Entre hippies, drogues et sexes ... Pourquoi choisir ?

Perv, une histoire d'amour est un roman extrêmement puissant. Les références y pleuvent et arment un style efficace et impeccablement maitrisé.

C'est un abîme permanent, dans lequel jamais l'auteur ne s'égare. Perv est le récit d'une Amérique toujours nimbée de ses illusions, mais consciente de sa déchéance. Perv, est la chronique quotidienne, acide et poignante d'une Amérique désabusée, sur laquelle -on s'en rend vite compte- un Bobby narrateur adulte pose un regard finalement bienveillant. Cynisme et humour noir, alternent avec des passages d'une impudeur et d'un génie ahurissant. Avec Jerry Stahl, le grotesque improbable devient brillant et dramatique.

Sans une once de mélancolie, l'auteur traite avec vulgarité mesurée et mots crus savoureux cette duplicité entre deux mêmes narrateurs, entre deux époques que se renvoient un style contemporain et efficace.

Le roman traite le normal dans ce qu'il est absurde, le minable dans ce qu'il a de grand sans jamais ne rien sur-exploiter. C'est probablement ce qui séduit le plus, du moins ce qu'il reste de cette séduction, une fois le roman achevé : le sentiment exquis d'avoir assisté à quelque chose de grand.

Orange Mécanique n'est pas loin. Perv est en tout cas tout aussi exubérant et désespéré.

Perv, est bien senti, dans une tonalité parfaitement originale, et d'autant plus saisissante que l'exercice semble aisé.

C'est un excellent roman. Edité dans un format original et ça n'en est que mieux.

Frédéric Javelas
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le 3 oct. 2011

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