Ce livre est un peu un roman d’apprentissage, mais je dirais que c’est surtout une sorte de coming out en forme de coup de poing dans la gueule…
Ancienne avocate pénaliste de sang aristo, Constance Debré fait son entrée dans la vie lesbienne à 46 ans. C’est une révélation pour elle, elle abandonne sa robe, son mari, son appartement pour faire un gros bras d’honneur à son ancienne vie, à sa famille et aux codes bourgeois. Son bras d’honneur est, certes, lesté d’une Rolex, mais elle assume : un pied dans la grande bourgeoisie, l’autre dans la dèche.
Deux parents toxicos, shootés à l’héro, une enfance passée entre les pattes d’une mère animale, sublime, emportée par ses addictions alors que Constance n’a que 16 ans. C’est tout ça qu’elle nous raconte ici, dans son style bien à elle: phrases courtes, mots crus, du cul, du brut, mais du rire aussi. Sa plume est sans cruauté mais sans artifices, pas de périphrases. Elle livre ses expériences amoureuses sans filtres, sans détours.
Tout me dégoûte ce soir, son corps, sa vie, ses phrases. Je fume.
Elle n’entend même pas que je me tais.
Pour son illustre famille (Constance s’appelle Debré. Comme Michel, son grand-père, baron du gaullisme et l’un des principaux inspirateurs de la Ve République. Comme Jean-Louis, son oncle, chiraquien historique et ex-président du Conseil constitutionnel) dont on pourrait longtemps développer la généalogie 5 étoiles, elle semble garder une certaine tendresse, mais elle n’a jamais adhéré à la « petite morale familiale », comme ses parents avant elle et si elle semble avoir tiré profit de l’éducation que lui a permis d’acquérir son milieu, elle s’émancipe clairement de l’hétéro-normativité qui y règne encore.
On n’a pas besoin d’argent quand on est riche. On n’a pas besoin des
autres quand on est riche. On n’a besoin de rien quand on est riche.
C’est une question de honte qu’on n’a jamais. Les pauvres ont bien
raison de nous haïr.
À l’instar de Virginie Despentes, elle aussi devenue lesbienne tardivement (à 35 ans), Constance Debré balance sa rage à la gueule de ses lecteurs et semble crier dans son blouson de cuir et jean crasseux « je suis lesbienne et je vous emmerde ».