Nouvelle-Orléans, dans un futur proche mais indéterminé (on est après Katerina, mais quand ?). Suite à une énième crise financière aux États-Unis, le dollar voit sa valeur grimper en flèche. Si dans un premier temps l'arrivée de ces "super-dollars" va doper le pouvoir d'achat des Américains, ils vont rapidement déchanter.
Car les salaires vont rapidement être réévalué à l'aune de ce nouveau dollar triomphant et donc revu largement à la baisse. Sauf que dans le même temps, les crédits que tout un chacun a pu contracter lorsque les taux étaient intéressants, ne sont pas révisés et les citoyens se retrouvent à devoir payer des traites bien trop importantes pour leurs maigres salaires. Et la valse des expulsions commencent...
C'est dans ce contexte maussade que Norman Spinrad situe donc son roman, dans la "Grosse Facile", cette Nouvelle-Orléans indolente, pauvre, dépravée et fondamentalement festive. On y suit en parallèle l'histoire de trois simples citoyens qui vont se voir propulser au premier plan de la vie de la cité : un tenancier de bar et de bordel du Vieux Carré, un flic issu du "marais" le quartier défavorisé de la ville et Mama Legba, une star de talk-show qui prétend être chevauchée par les loas.
L'intrigue s'articule donc autour d'une grève de la police qui décide de ne plus expulser les membres des forces de l'ordre puis, de fil en aiguille de ne plus expulser personne. Vont commencer alors des manœuvres politiques sur fonds de magie vaudoue avec pour enjeu l'envoi ou non de la garde nationale pour remettre au pas la "Grosse Facile". Je ne vais évidemment pas trop en dire, mais j'ai trouvé tout cela très réussit et très plaisant à lire.
Le ton du roman est, comme souvent chez Spinrad, grinçant, mais agréable. Chacun des personnage a son style, sans que ce soit trop marqué ni caricatural. La lecture se fait avec aisance, malgré le contexte très américain qui peut dérouter avec ces subtilités fédérales (assemblée de l'état de Louisiane, cour constitutionnelle etc...)
Le récit reste un brin utopiste et les évènements relatés auraient bien peu de chances de se dérouler tels qu'il les imagine s'ils arrivaient réellement, mais c'est cet utopisme faussement naïf que j'aime chez Spinrad.