Quand on fait sa connaissance, Elizabeth n'est déjà plus.
Elle est Beth.
Elle fait partie de ces êtres que la vie a laissé de côté. Mauvais tirage à la grande loterie, mauvaise étoile.
Elizabeth est une éprouvée, une abandonnée, encore en vie mais tant de fois disparue; une âme suspendue.
Beth est son dernier masque, celui du clown, qui révèle l'âme à qui sait voir.
Beth est drôle car toujours à côté.
Elle est drôle car au final toujours centrée, c'est nous qui n'avions pas tourné les yeux du bon côté.
Beth permet à Elizabeth de se prouver qu'elle est toujours en vie, mais pour combien de temps?
Car Elizabeth c'est aussi le visage de cette petite fille qui est à moitié elle, et l'ombre de cette "Madame Bâtonnets de Poissons" qu'elle aurait pu être.
Elizabeth est-elle le reflet perdu de Beth? Ou est-ce l'inverse?
Quand les fantasmes et la réalité se rejoignent, et que les jeux de miroirs illusionnent;
Comment retrouver le chemin ? Quand est-ce qu'on arrive ?
Howard Buten est un magicien. Sous couvert d'une histoire à l'apparence banale - Elizabeth gérante de supérette, son passé foutraque, ses maris multiples, son enfant unique. - nous livre un texte d'une profondeur rare. Il déniche la poésie derrière l'ordinaire, capture le cocasse dans le quotidien et amène la psychologie dans les allées d'une supérette.
On oscille constamment entre le rire et les larmes, le burlesque et le tragique, la vie et la mort.
On s'interroge aussi, sur nos propres masques, sur ces reflets illusionnés de nous même.
Dans notre monde, si on attend de trouver quelque chose d'assez drôle pour en rire, on meurt en pleurant. Et si la beauté est si puissante que même l'amour en a peur, il n'y a qu'une seule façon de survivre - pouvoir rire et aimer sans raisons. Et sans aide.