ns la foulée de Django Unchained, est paru il y a quelques jours un nouvel ouvrage consacré à Quentin Tarantino. Prenant le pari que son cinéma est un art du recommencement et non de la reprise, ce livre collectif s’attache à analyser, film après film, l’œuvre de l’américain. Si la démarche est salutaire et si le moment paraît opportun pour légitimer, une fois pour toutes, Tarantino en tant qu’auteur, le résultat peut déconcerter.

Les auteurs ont été recrutés dans le champ de la critique cinématographique (Jean Narboni, Pascal Bonitzer, Emmanuel Burdeau) mais aussi dans ceux de la philosophie de l’art (Patrice Maniglier), de la littérature (Marie Gil) et même de l’anthropologie (Eric Chauvier) : il en ressort une impression parfois un peu lourde d’ouvrage à tendance universitaire, c’est-à-dire largement analytique et intellectualisant. Ce qui n’est pas un problème en soi, mais qui demande une sensibilité à l’utilisation en rafale de vocabulaire abscons, notamment dans le texte L’image vengeance, Tarantino face à l’Histoire, par Marie Gil & Patrice Maniglier, consacré à Inglourious Basterds. Plus claire et lisible est la ligne de défense de Jean Narboni, sur le même film, en réponse aux attaques qui ont été faites au cinéaste sur son prétendu cynisme historique, voire son révisionnisme. Assez surprenant est le texte d’Eric Chauvier, seul à ne pas magnifier le cinéaste, au contraire : son analyse de Kill Bill Vol.1 & 2 (Jouir pour perdre) met en avant la vanité (au sens premier de vain) de certains de ses films, qui selon l’auteur serait due à la manière dont Tarantino « légitime le démantèlement de (la) « quête de l’essentiel », à laquelle il substitue des références prétendument jouissives, mais sans jamais aboutir à un résultat qui éluderait ce sentiment de défaite ». Les détracteurs et autres Tarantino-sceptiques se sentiront moins seuls.

Enfin, le grand moment de l’ouvrage est sans doute l’article de Pascal Bonitzer (De la distraction, sur Pulp Fiction), originellement paru dans la revue Trafic en 1995, à une époque où considérer Tarantino comme un auteur n’était pas encore de mise. Pourtant, Bonitzer défend intelligemment ce cinéma qui articule le langage et la violence dans une dialectique plus subtile qu’elle n’y paraissait à l’époque. Aujourd’hui, tout le monde en est convaincu, mais cet article pointe une qualité essentielle et indéniable du cinéaste. Il a ainsi valeur de précurseur pour l’ensemble de l’ouvrage. Quant à celui-ci, on le comprend au final comme un faisceau de regards analytiques qui ne convergent réellement que vers un seul but : convaincre de la valeur intellectuelle du cinéma de Quentin Tarantino, et donc de sa légitimité comme objet d’études. A prendre ou à laisser.
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le 22 juin 2014

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