Voilà un petit discours à relire urgemment, ; à l'heure où, en France, une minorité bruyante et délinquante impose sa haine, ses frustrations et son agenda par la force et contre le processus démocratique et légal ; à l'heure où, en Europe et dans le monde, une version dégradée de ce fascisme s'insinue dans les esprits et s'invite dans les institutions, les parlements, les gouvernements et les médias.
Car Eco le montre, le fascisme est, et a toujours été (y compris au début des années 30) un terme générique, fourre-tout, qui peut s’accommoder de beaucoup d'idées contradictoires sur le fond tant que les mobiles, et la forme, répondent au cahier des charges initial: le refus du modernisme (et lde la rationalité), l'accumulation des frustrations sociales, le nationalisme, la haine de l'autre, et de l'intellectuel en particulier (et partant, de la critique), la légitimation de la force et de la violence comme méthodes pour accomplir "l'action" politique, sacralisée et hégémonique en l'absence d'une réflexion rendue impossible par l'absence de débat critique.
Le fascisme c'est aussi la théorie du complot via un regard déformé et maladif sur "l'ennemi politique" (l'élite, le riche, l'intellectuel, l'industriel, le bobo, les médias, le banquier, le Juif), de nature à la fois à surestimer son impact sur le monde (et donc, dans leur cerveau mal-fonctionnant, à accentuer la responsabilité de l'ennemi désigné dans les problèmes de leur vie) et et à minimiser leur mérite ou leur capacité de défense.
Pour éviter le point Godwin habituellement resservi en de pareilles circonstances - et qui montre bien, qu'aujourd'hui, le point Godwin est le nouveau point Godwin : plus de discussion après lui - , Eco précise bien qu'annoncer le retour du fascisme ce ne sera jamais le retour "d'Auschwitz, des chemises noires, et des discours du Dulce". Les artifices de l'histoire ne se répètent pas, autrement que par des symboles choisis par consensus, ce qui ne risque pas d'arriver pour le fascisme.
Non, le fascisme, c'est une rhétorique, une méthode violente et revancharde de concevoir la politique et les relations sociales qui peut resurgir si l'on baisse la garde de notre rationalité et de notre civisme et sans même, évidemment, que les principaux acteurs s'en revendiquent ; par calcul peut-être, par ignorance sans doute. Et c'est ce qui se passe actuellement en France, en hiver 2018-2019.