L’idée de départ est simple : parallèlement à la Renaissance, qui se caractérise par la clarté, la rationalité et le raffinement des œuvres qui s’y rattachent, il existe, affirme Federico Zeri, une « Pseudo-Renaissance » obscure, passionnelle et brutale. J’ignore si cette thèse est un lieu commun unanimement partagé dans le monde de l’histoire de l’art ou une hérésie, si elle résulte d’une intuition brusque ou d’une patiente étude, si elle est considérée aujourd’hui – le livre est paru en 1983 – comme une tentative avant-gardiste vite oubliée ou comme une première pierre. Ainsi ne puis-je pas dire si c’est un pavé dans la mare ou un pétard mouillé que ce passage, par exemple : « Il semblera sans doute inacceptable que l’on puisse utiliser le terme de Pseudo-Renaissance pour qualifier l’art de Botticelli. Il existe pourtant un autre cas, sans doute encore plus déconcertant, auquel il est difficile d’appliquer le terme de Renaissance entendu dans son sens artistique et non historique : il s’agit de celui de Paolo Uccello, considéré comme un des pères fondateurs du style nouveau, du moins dans son acception courante. » (p. 29 de la réédition « Payot & Rivages »).
Plus précisément et en d’autres termes, l’essai soutient qu’une Renaissance au sens historique serait apparue la première, autoproclamée telle (« dans la terminologie adoptée par les historiens, le terme Renaissance est le seul […] dont l’invention remonte plus ou moins directement à l’époque qu’il désigne », p. 7) avant qu’une partie du monde artistique lui emboîte le pas tandis qu’une autre restait du côté de l’ancien monde.
Encore une fois des idées m’ont paru convaincantes ; mais pas assez connaisseur d’histoire de l’art, et surtout pas de cette période, il ne m’appartient pas de les ratifier ou de les disqualifier, ni en bloc, ni dans le détail.
Pourtant je pense pouvoir juger de la façon dont l’essai les expose. Incontestablement le propos est clair. Les planches d’illustrations sont les bienvenues. Un minimum de concentration suffira au lecteur pour surmonter les quelques phrases longues qu’on trouve çà et là. Renaissance et Pseudo-Renaissance a le mérite de ne pas abonder en jargon, ce qui rend le tout plutôt clair, même si le nom d’une bonne partie des artistes évoqués dans l’essai ne dira strictement rien au non-spécialiste.
Et pour tout dire j’aurais préféré que Federico Zeri, plutôt que de balayer largement un très grand nombre d’œuvres, en choisît quelques-unes de très représentatives (car j’imagine qu’il en existe), s’y tînt, et les analysât en détails, quitte à ce qu’il adoptât le point de vue subjectif de l’amateur d’art – car le livre sent la passion mais la montre peu. On aurait largement dépassé la petite centaine de pages que constitue l’essai, mais on y aurait finalement gagné en connaissances.

Alcofribas
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le 8 sept. 2017

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