Des échos se donnent la réplique

Avant tout chose, il convient de préciser que «Répliques» n’est PAS un roman sur la catastrophe de Fukushima. Celle-ci est évoquée, mais n’est qu’une toile de fond, un contexte que les personnages subissent. Les «Répliques» évoquées par le titre ne sont ainsi pas tant les secousses sismiques que subit le Japon que les échos de la catastrophe sur ces personnages et leurs secrets.

Ce roman est donc centré autour de la vie de Vincent, professeur de français dont le mariage périclite depuis l’accident de voiture de sa femme, et qui se voit offrir l’opportunité de retourner enseigner au Japon, dans le lycée français de la ville. Ce départ lui offre l’occasion de donner un nouvel élan à sa vie, et tout semble alors se passer au mieux : une classe intéressante, une élève (Nina) particulièrement brillante, un mariage qui s’apaise peu à peu,... Puis survient Fukushima ;
Le climat dans lequel Tokyo a vécu les jours suivant est ici extrêmement bien transcrit. Rappelons que l’auteure se trouvait sur place au moment des faits qu’elle raconte, et puise avec brio dans son vécu pour peindre cette atmosphère, et transcrire ce qu’elle avait d’irréel, d’oppressant, de particulier, sans jamais trop en faire.
Aux répliques du séisme succèdent alors les répliques comportementales. Tous les personnages sont affectés, certains plus que d’autres, et le roman prend finalement très naturellement le cours d’une enquête policière. Nul cadavre découpé en morceaux ou jeu de piste macabre ici : uniquement des personnages confrontés, en très peu de temps, à plusieurs choses impensables, et qui tentent d’en tirer un sens...

Cet hybridation entre un roman (presque) «d’aventure» — avec le départ pour le Japon — et un roman plus policier dans sa seconde partie donne à «Répliques» un souffle particulier. L’avidité avec laquelle on (re)découvre le Pays du Soleil Levant cède peu à peu le pas face à l’envie de comprendre le drame qui se joue ensuite, sans que cette évolution ne paraisse forcée.
S’il m’est ainsi difficile de parler de «suspens» d’un bout à l’autre, la première partie en étant relativement dénuée, je ne peux que souligner la pertinence du récit tout au long de la lecture. Cette première partie reste prenante. Les personnages sonnent juste, le voyage et la découverte sont très présents, et on prend plaisir à arpenter Tokyo avec eux, à s’inscrire dans la vie de ce petit lycée à l’étranger, et à en côtoyer les occupants.
Quant à la seconde partie, elle parvient à tenir en haleine le lecteur jusqu’à sa conclusion, sans abuser d’hémoglobine ou de sadisme. L’auteure dose très bien ces éléments, use de ce dont elle a besoin pour faire progresser l’enquête, et insuffler la tension nécessaire quant à son dénouement. Il m’a été très difficile d’interrompre ma lecture durant cette moitié du livre, tant j’avais envie de connaître le fin mot de l’histoire.
Une dernière remarque sur cette enquête : les indices disséminés le sont avec intelligence. Il n’est pas impossible de deviner, de faire parler les pistes brouillées et les allusions, mais j’ai trouvé très agréable que le coup de théâtre fasse très naturellement se recoller tous les morceaux.

Malgré cela, je dois être assez critique sur la conclusion de ce livre. L’épilogue, à mon avis, n’apporte rien au récit. S’il est possible de comprendre l’envie de l’auteure de clarifier le destin de certains personnages (et bien que je préfère en général que ce soit le cas), il est possible d’arrêter sa lecture à la conclusion du dernier chapitre, sans gâcher quoi que ce soit.

Pour conclure cette critique, je ne peux que recommander la lecture de «Répliques» à tous les amoureux du Japon, qui y découvriront des descriptions très vivantes de ce pays fascinant, ainsi qu’aux amateurs d’enquêtes policières et de drames. J’ai, en tout cas, passé un très bon moment en lisant ce livre.