Un petit livre bien ficelé, trop bien ficelé même. L’imminence de la mort et l'angoisse qu'il en résulte, avec le style de Belin que je lui connaissais déjà, me faisaient espérer quelque chose de plus profond encore, qui serait allé chercher dans le tout viscéral. Mais au lieu de celà, c'est une promenade sous-marine, faite de vagues d'algues et de détritus à laquelle j'ai assistée.
Tout au long du livre, les pensées du personnage principal se révèlent en une multitude de minuscules chapitres, comme autant de bulles d'air s'échappant d'un cadavre, et qui remonteraient doucement à la surface, vibrant des souvenirs et des mots que l'on a voulu dire, ceux que l'on imagine, alors que la mort s’empare de nous et nous enveloppe. L'immensité de l'eau, l'abîme de l'eau est tout autour et nous enveloppe, alors que cet homme qui expire nous raconte la vie qu'il n'a pas tout à fait vécue et la mort qu'il ne vivra pas tout à fait non plus.
C'est un homme en morceau, et ses souvenirs sont en morceaux, brisés; des miroirs dans lesquels se reflètent son cynisme. Les souvenirs coulent les uns sur les autres, se succèdent, se chevauchent, se répètent, se complètent, ils coulent les uns contre les autres vers le même but, le même sol boueux, le même sol sombre, inéluctable: la mort. Belin sait manier les bons mots, et nous décrit avec une terrible précision les sensations que souvent nous ne savons voir ou même décrire.
En conclusion, c'est une belle noyade. Mais au fond, je suis déçu que ce ce livre ne soit juste que bon: j'aurais voulu me noyer plus longtemps, plus profond, plus loin, et plus fort.