Cet essai sur la dépression (la vraie, la dépression clinique, pas la déprime comme le précise l’auteur) présente de nombreux écueils quand on traite un sujet pareil.
D’abord il fait à plusieurs reprises l’apologie de la dépression, sans laquelle Abraham Lincoln n’aurait pas eu l’empathie nécessaire pour son combat contre l’esclavage, sans laquelle Churchill n’aurait pas été le chef de guerre qu’on connaît. L’auteur laisse également entendre que la dépression lui a permis de développer une sensibilité exacerbée et un regard différent sur la vie. Ce genre de discours est naïf mais surtout dangereux. En réalité la dépression ça broie des gens, et pas d’une façon romanesque. Ca fait perdre un travail, ça fait divorcer, ça fait se sentir minable, ça fait sombrer dans l’alcool et ça tue surtout.
Ensuite, même si l’auteur s’en défend, les propos anti médicaments sont très présents. On apprend que la science ne sait pas précisément ce qu’il se passe dans le cerveau en cas de dépression et que la communauté scientifique tâtonne sur le sujet. Surtout l’auteur explique que se remettre d’une phase dépressive sans recourir aux médicaments lui a permis de la vivre pleinement et donc de mieux l’appréhender et la combattre. Enfin il dresse une liste de remèdes alternatifs parmi lesquels le yoga, la course, le voyage, ou encore “ralentir” qui donne lieu à un chapitre du livre. Pour parodier l’auteur, dire cela c’est comme dire à quelqu’un qui est atteint d’un cancer des poumons qu’il peut s’en sortir sans traitement mais en faisant de l’activité physique et que cela sera l’opportunité de vivre pleinement sa maladie.
Enfin, l’auteur porte un coup de griffe aux personnes et aux proches qui ne comprennent pas ce qu’on traverse en cas de dépression. Oui, c’est vrai, pour quelqu’un qui n’en a jamais connu c’est difficile de comprendre la détresse et l’incapacité que cela engendre. Mais les mentalités ont nettement progressé sur la reconnaissance des maladies mentales et ce genre de livre qui glorifie la dépression et lui prête des remèdes non scientifiques pourrait au contraire faire reculer cette reconnaissance.
En cas de symptômes dépressifs, consultez un professionnel de santé en urgence pour, avant toute autre chose, trouver un traitement adapté. Personne ne doit s’infliger cette souffrance.