La fantasy est, à sa plus pure origine, une littérature d'émerveillement et d'évasion. En tant que ponts entre la réalité et le fantastique, les récits qui portent son blason sont de véritables havres fantasmagoriques où la magie s'introduit dans notre quotidien comme un élément ordinaire. Si ce genre littéraire trouve ses racines dans la littérature du XIXème siècle, avec des auteurs iconiques comme Ian McDonald, Lord Dunsany, Abraham Merritt ou encore Tolkien, elle a depuis multipliée ses ramifications et ses sous-genres, au point d'être devenu davantage qu'un simple lieu où le merveilleux et la magie cohabitent en harmonie.
Cette ramification où les travers de notre époque entrent en collision avec les mondes magiques s'appelle la dark-fantasy et aujourd'hui, nous allons parler d'un de ses plus grand représentants actuel: la saga du Sorceleur, écrite par Andrzej Sapkowski.
Cette saga, composée de sept volumes, narre l'histoire de Geralt de Riv, un homme au métier plutôt particulier : sorceleur. En effet, moyennant finance, il s'occupe des monstres posant problèmes aux rois comme aux paysans.
Agissant comme une passerelle entre deux mondes qui ne peuvent se comprendre, les sorceleurs tentent d'apporter un semblant de paix dans un monde où les créatures magiques disparaissent progressivement, laissant place à un monde d'Hommes. Dans ce lieu où l'équilibre est des plus fragile, Geralt cherche son destin, au milieu de contrats à effectuer, de guerres, de complots magiques, et d'un enfant de la Providence qui pourrait bien chambouler sa vie.
L'échiquier du roman se retrouve rapidement composé de multiples pièces, évoluant dans de multiples temporalités et espaces, avec toujours pour fil conducteur le sort de l'enfant de la Providence et l'invasion Nilfgaardienne. Ces deux fils feront office de moteurs durant toute l'épopée, évoluant à divers rythmes selon les points de vue et les impacts des événements.
Cette multiplicité des points de vue est d'ailleurs l'un des attraits majeurs de ce récit, en plus d'être conçue avec minutie et cohérence. Car si elle peut facilement dérouter, elle demande par la même une attention totale du lecteur jusqu'à la dernière page. Il est commun de découvrir le point d'un personnage par l'intermédiaire d'autres, ou même parfois du dit protagoniste à un âge avancé ce qui, même s'il nous révèle d'avance la suite de son existence, reste souvent d'un impact mineur dans le récit, car compteront plus souvent les causes que les finalités.
La dimension politique prend aussi une part majeure de l'histoire, car au-delà des multiples batailles qui ponctuent le récit, se joue un véritable théâtre de marionnettes dont les conceptrices, les magiciennes, manipulent les fils du destin pour les faire tourner en leur faveur. Cette implication de la magie dans les scènes royales et dans l'échiquier diplomatique est aussi l'un des éléments intéressants que développe avec beaucoup de soin l'auteur au fur et à mesure de son récit.
Suivre l'épopée de ce sorceleur aura été un plaisir immense et intense, où chaque page tournée est un pas vers le monde étrange et sombre de Saposwki, et où le merveilleux et la bonne foi n'ont pas leur place.