Une lecture d'été légère"
"Laissez venir à moi les petits enfants...
Lorsque la première bombe tomba, le souffle projeta des enfants morts contre les murs."
Les deux premières phrases annoncent l'ambiance du reste du livre. Pendant 215 pages, l'auteur décrit cliniquement une attaque aérienne sur une ville allemande pendant la seconde guerre mondiale. Le ton est froid, neutre, très descriptif et objectif. Nous suivons le destin d'une poignée de personnages, qui pour la plupart n'ont pas de nom et sont désignés par leur fonction (le lieutenant, la jeune fille, le soldat etc). Personnes brûlées vives, éventrées, estropiées, corps disloqués, ensevelis, viol...Tout cela est égrené mécaniquement et sans trace d'émotion. Les êtres humains apparaissent sans identité, des pantins balayés par un souffle apocalyptique. L'impression est d'autant plus terrible qu'entre chaque chapitre est insérée une page écrite à la 1ère personne et portant la voix d'un de ces personnages martyrs qui décline son identité et évoque sa vie, ses souvenirs, de manière très subjective, qui contraste avec le froid étalage de boucherie que constitue le reste du livre ("Ma couleur préférée était le bleu. J'avais des cheveux longs que je portais enroulés sur la nuque. Si cela avait été possible, j'aurais aimé apprendre à danser.")
Ce livre montre clairement et directement toute l'horreur de la guerre subie pas la population allemande. Ce n'est pas si courant dans les oeuvres traitant de la seconde guerre, où le point de vue des vainqueurs domine. Le nazisme n'est qu'évoqué qu'à travers le fanatisme subsistant chez certains personnages, et jamais nommément. Tout ce qui reste ici c'est l'animalité de l'homme face à l'enfer, sa fragilité, sa terreur ; guère plus de trace d'idéologie, ces personnages pourraient tout aussi bien être Anglais, Français ou Japonais.
Au milieu du brasier, de la mort, l'auteur a pris soin de laisser une ou deux traces d'humanité pour nous éviter de sombrer totalement dans le désespoir. Cependant la lecture reste très éprouvante, on referme le livre la boule au ventre, accablé par le destin des personnages. Une lecture malgré tout forte et je pense nécessaire pour un autre point de vue sur la seconde guerre.
Après, moi j'avais mis ce livre dans ma valise de vacances, peut-être pas la meilleure idée que j'ai eue, c'est pas léger-léger après la baignade.