Ayant découvert avec Agent Double la charmante maison d’édition Super 8, le hasard a voulut que je m’essaye à Stone Junction afin de découvrir si ladite maison d’édition avait vraiment bon goût ou si les livres de O’Malley n’avaient été qu’un coup de chance.
Je peux me tromper, mais je crois qu’il ne s’agissait pas de chance.
J’admet avoir acheté le livre sans vraiment m’intéresser à la quatrième de couverture. Quand on veut découvrir les oeuvres de quelqu’un (même s’il s’agit d’une maison d’édition), il faut savoir lui faire confiance aveuglément afin de savourer sa découverte sans a priori. J’optais donc pour l’achat compulsif et une lecture à peine renseignée (le premier paragraphe du résumé pour m’occuper dans la file d’attente à la caisse).
Tout d’abord, je dois dire que les road trip spirituels et les parcours initiatiques ne sont pas forcément ma tasse de thé.
Pourtant, j’ai littéralement dévoré Stone Junction. Le refermer au moment de l’extinction des feux s’apparentait à une petite torture organisée par ma conscience pragmatique. Les heures ne pouvaient pas filer à une telle allure : mes pendules s’étaient détraqués simultanément pour me forcer à abandonner momentanément ma lecture alors que j’avais encore envie de lire.
Alors pour remédier à cela, je me suis calée dans mon canapé en fin de matinée, bien décidée à offrir tout le temps nécessaire à la lecture de Stone Junction. Et mazette, après 6h de lecture, je viens de tourner la dernière page et je m’étonne moi même d’avoir adoré ce livre.
Et personellement, j’adore ce sentiment. Lorsque mon cerveau me dit qu’en toute logique, je n’aurai pas dû accrocher à ce point, que ce n’est pas vraiment mon genre de livre, que l’histoire n’est pas franchement du genre de celles qui me font planer mais que mon coeur lui dit d’aller se faire voir et qu’il a passé un super moment, même s’il ne sait pas pourquoi.
Enfin, il sait quand même un peu pourquoi si je veux être honnête.
Parce que Dodge a donné vie à des personnages absolument fantastiques, complexes, parfois difficiles à suivre, souvent perchés, toujours intéressants. Des personnages différents évoluants dans des sphères différentes mais passionnants chacun à leur manière.
De la jeune Annalee qui n’a pas peur de cogner une nonne fort peu chrétienne pour protéger sa liberté et son fils à naître à l’amant rendu fou par l’amour en passant par le cinglé des drogues ou l’accros aux jeux, les personnages de Dodge se succèdent pour apporter à son héros l’élévation émotionnelle, spirituelle, intellectuelle nécessaire pour en faire un grand homme totalement perdus mais terriblement attachant. On suit le fil de son existence sans jamais se lasser, parfois perplexe mais toujours curieux de la prochaine rencontre à venir.
Sans me lancer dans des spoilers que je déteste, je dirai que le final de cet ouvrage résume très bien sa totalité. Il ne pouvait en être autrement même si l’on peut se sentir complètement perdu, incapable de réagir. Même si l’on se dit que les choses auraient put être différentes, même si l’on se dit que cela aurait put être meilleur, on se dit aussi que c’était impossible quand on y pense.
Bien sûr, on peut toujours trouver à redire. Certaines petites choses restées mystérieuses auraient put gagner à être révélées. Certaines rencontres auraient put gagnées a être renouvelées (certains personnages donnent un peu l’impression de n’être là que pour faire avancer Danniel, et même si la chose est totalement vraie et normale, on a un petit pincement au coeur à devoir les abandonner. Mon grand regret étant d’ailleurs de ne pas retrouver Sept Lunes), certains personnages auraient put gagner a être creusés ou moins énigmatiques. Mais cela fait partit du charme du livre. Et puis combien de personne rencontre-t-on durant notre existence, qui nous apporte un peu ou beaucoup, et que l’on ne re-croise plus une fois le moment passé ?
Stone Junction est donc un livre passionnant regorgeant de personnages hauts en couleurs et en émotion. Le parcours initiatique d’un jeune homme qui partait avec peu de chances à la naissance pour devenir quelqu’un de grand perdu dans l’immensité de ses désirs et de ses espoirs.